Vous ai-je déjà parlé de notre seigneur
ULTRAKILL ?

ULTRAKILL est un fast FPS dans la veine de Quake, couplé à une composante scoring de type Devil May Cry. Là où Dusk et consorts jouaient la carte d'une esthétique rétro tout en restant assez classiques dans la formule, ULTRAKILL est une toute autre bestiole.
MANKIND IS DEADD'abord, pour la présentation. Certes, l'esthétique de l'époque ne plaira pas à tout le monde, mais c'est au service du reste des systèmes du jeu. En effet, la vitesse moyenne de marche est d'environ 70km/h, pas de bouton de course (évidemment) mais un slide qu'on peut maintenir à l'infini et enchaîner à l'envi, 3 dashs régulés par une barre de stamina qui se recharge très rapidement, couplé à des wall jumps, des stomps et autres joyeusetés. On est dans la continuité spirituelle de ce que proposait cette époque du JV en terme d'options de mouvement. Sauf que là, tout est calculé et millimétré pour que se déplacer rapidement et efficacement soit une expérience jouissive. Le fait que la mort ne soit pas particulièrement punitive, checkpoints assez fréquents et respawn instantané oblige, vous ne serez JAMAIS dégoûté d'une mort. Et si vous êtes mort, c'est de votre faute. Même si le perso flotte terriblement dans les airs (et couplé à la vitesse globale du jeu, on met un peu de temps à s'adapter) et que tout va TRÈS vite, on se surprend à rapidement rentrer dans la zone. Et c'est grâce aux autres mécaniques de gameplay et au level design truffé de secrets à la sauce DOOM/Quake, d'interactions amusantes, de challenges intéressants et de niveaux secrets déroutants (j'ai rarement autant été aussi agréablement surpris par les propositions d'un jeu, vraiment). Jusque là, on pourrait se dire que ce n'est qu'un fast FPS tout ce qu'il y a de plus banal, mais...
BLOOD IS FUELJe n'aime pas trop utiliser le terme "juice" pour décrire ce feeling qui fait qu'une action vient stimuler votre production de dopamine. Mais la réalité, la vraie, c'est qu'après ULTRAKILL, Hotline Miami et autres donnent l'impression de vivre un jour sans fin sous cocktail valium-morphine-valériane dans un EHPAD. Tout, je dis bien TOUT, est fait pour que chaque tir, chaque coup en mêlée, chaque parade, entraîne un sentiment de "Oh bordel c'est si cool, j'en veux ENCORE !", ceci grâce à des feedbacks visuels et sonores qui fonctionnent monstrueusement bien. Du juice donc, car il en est fortement question. Point de pack de soins ou de santé qui se régénère dès qu'on prend trois grosses inspirations à couvert, ULTRAKILL propose un système de soin très offensif, puisque chaque ennemi explose en des hectolitres de sang et de gibs, sang qui est votre seul moyen de vous soigner en dehors d'un parry, bien plus risqué mais terriblement satisfaisant. Pas question de se planquer ici, on vous invite à rentrer dans un déferlement de violence débilement bien pensé qui fait qu'on est à la fois pas très sûr de ce qu'on fait au début, tout en étant intimement convaincu qu'on pourrait le faire de manière plus stylée. Et ça tombe bien.
HELL IS FULLQue serait un fast FPS sans arsenal conséquent. Et ULTRAKILL est malin : 5 types d'armes, 3 variations par type, autant de moyens de jouer au jeu que vous voulez. Revolver, fusil à pompe, nailgun, railgun, lance-roquettes, vous avez le choix. Munitions illimitées (sauf pour le nailgun qui fonctionne au cooldown), un tir secondaire très particulier par variante, et surtout,
mille putains d'interactions entre chaque armes. Et ces interactions sont une composante qui font que le gameplay est incroyable. Comme un Devil May Cry ou un Bayonetta, le jeu intègre un système de combos qui vous fait gagner des points en fonction de votre capacité à utiliser toutes vos armes de manière créative et efficace. Il va non seulement falloir aller vite, vaporiser un maximum d'ennemis, mais il va falloir en plus faire tourner votre arsenal (en plus, le jeu est malin, car le système de notation s'adapte au nombre d'armes que vous jouez). Ajoutez à ça un système de parry très bien pensé, et vous pourrez renvoyer dans la gueule des ennemis ces projectiles qui vous font si mal, explosion, bonus de dégâts et points de style en prime. Les divers ennemis vous forceront à penser à mille choses en même temps et à prioriser à la volée, vous avez la recette pour un FPS qui au final est bien plus malin qu'il n'en a l'air.
Allez, je vous donne un exemple pour le plaisir parce que je trouve ça fou : le tir secondaire de la 2eme variante du revolver lance une pièce devant vous. Tirer sur cette pièce avec votre revolver multiplie les dégâts de cette balle et fait ricocher votre balle directement en direction du point faible de l'ennemi le plus proche. Sauf que vous pouvez en lancer 4 de suite. Et que ça fonctionne aussi avec le railgun. Et que vous pouvez mettre un coup de mêlée à ces pièces pour les envoyer dans la gueule d'un ennemi, ce qui la renvoie en l'air tout en augmentant le bonus de dégâts. Sans déconner, le nombre d'interaction entre ces pièces et l'intégralité de l'arsenal me sidère à un point que ça en devient fou. Ce qui fait le que le skill ceiling est absolument inexistant, vu qu'il y aura toujours une méthode débilement dure, mais efficace et visuellement dingue pour nettoyer cette salle qui vous fait mourir en boucle.
Bref, ULTRAKILL c'est de la balle.
En plus la musique n'est pas en reste, on est dans un mélange de gros breakcore qui tache et de metal Mick Gordon-esque qui soutient l'action de manière incroyablement solide:
Et franchement, je crois que c'est mon GOTY. Et je dis rarement ça d'un jeu encore en early access (même si il est déjà bien complet, l'intro et les deux premiers actes - soit une grosse trentaine de niveaux - sont déjà dispos).
Sinon, je peux également vous parler de
Cruelty Squad.

Alors oui, vous allez me dire "Bordel, je pense que tu as perdu 9/10 à chaque œil, et ton seul projet c'est de nous niquer les nôtres aussi", et d'une certaine manière, vous avez sûrement raison.
Car Cruelty squad est l'équivalent d'un Deus Ex sous LSD.
Le pitch : Dans un monde où l'accès à la résurrection se monnaye à quelque chose comme 500$, les tueurs à gages ne suffisent plus. Et quand les tueurs à gages ne suffisent plus, on appelle Cruelty Squad, une multinationale composée de tueurs efficaces dont la mission est de dessouder leur cible de la manière la plus efficace et douloureuse possible. De toute façon, ils n'en mourront pas.
Mais qu'est-ce qui différencie Cruelty Squad des autres jeux, mis à part la direction artistique totalement art brut ? Ben déjà, c'est le projet d'un homme, Ville Kallio, qui un jour (et décidément en pleine redescente de l'intégralité de son armoire à pharmacie) a décidé qu'il détestait deux choses dans le monde, le capitalisme et les ophtalmologues.
Vous jouez donc une petite main de Cruelty Squad (dont l'objectif est de faire assez d'argent pour s'acheter une maison) que son manager envoie faire différentes missions pour éliminer une ou plusieurs cibles dans une zone plus ou moins trippée de la dystopie qui nous attend sous Trump et Musk. Armé d'à peu près rien à part son courage, on se lance dans la première mission, on ouvre une porte, et on se fait instantanément déglinguer par le service d'ordre du bâtiment. Le jeu est DUR comme pas permis, il va nécessiter beaucoup de trial and error, il va sembler débilement punitif, mais on s'y fait. C'est assez étrange, parce que le jeu essaye au maximum d'être repoussant et déroutant, l'interface est cheloue (et fera mourir d'un arrêt cardiaque immédiat les UX/UI designers de la pièce) la maniabilité est cheloue, la visée est cheloue, l'univers est turbo chelou, mais chez moi ça a click. Toutes ces petites missions se font en une vingtaine de minutes une fois qu'on a fait quelques essais pour tâter le terrain, et la plupart sont terminables en moins de 2 minutes une fois que l'on maîtrise le système. Et dieu sait qu'il y a des choses à maîtriser.
Je parlais de Deus Ex en introduction, c'est parce que le jeu reprend sous une certaine forme le système d'augmentations. Chaque augmentation prend un des 4 slots disponibles (bras, jambe, tête, torse), et ce n'est ABSOLUMENT pas ce à quoi vous vous attendez. Car on est dans le biopunk grotesque, donc pour gagner en verticalité, vous aurez le choix entre Gunkboosters (qui vous donne un double saut par "une évacuation de déchets de biomasse" par vos talons), et autres Grappendix (utiliser votre gros intestin pour grimper à un immeuble n'a jamais été aussi fun), ça vous donne l'esprit. Tout ça coûte de l'argent, que vous pourrez investir dans un stock market qui se déroule en temps réél dans le jeu, ou en revendant les organes des divers sbires que vous flinguerez tout au long du jeu (un foie augmenté, ça aide pas mal les cadres sups paraît-il). Contrairement à Deus Ex, vous pouvez swapper votre équipement et vos implants à chaque mission. Et quelles missions. C'est cynique, ça dunke à l'infini sur la philosophie techbro, sur les figurines pop, les NFTs, les dérives d'un capitalisme où l'état n'existe plus et le pouvoir est concentré au sein des multinationales pharmaceutiques, automobiles ou du divertissement (coucou la ref au stonks de Gamestop).
Et peu à peu, le côté cynique et désabusé qu'on ressent à être un micro rouage dans une machine qui tournera avec ou sans nous prend le pas sur le joueur et le personnage. Et c'est à ce moment là que Cruelty Squad révèle qu'il n'est pas juste un jeu qui joue sur le shock factor de son esthétique, mais un jeu qui est pensé pour être résolu de manière alternative et créative. En plus il a quelque chose à dire, même si c'est pas toujours très fin, et ça, ça m'plaît.
Je vous supplie de passer au delà de son esthétique, parce qu'il vaut vraiment le coup.