Et si tu veux enchaîner sur le MIDI
Tiens, ça faisait quelque temps que ça me taraudait de répondre à ça aussi, donc pourquoi pas maintenant.
Le MIDI, c'est quoi ? Le sigle, déja, vaut dire Musical Instrument Digital Interface. C'est un protocole de communication créé en 1981, à la base pour les synthétiseurs. Pour comprendre ce qu'est le MIDI, il faut comprendre également d'où on vient.
Petit historiqueA l'époque des premiers synthétiseurs analogiques (Moog, Buchla etc.), la communication entre le contrôleur (en gros, le clavier) et le synthétiseur se faisait également de façon totalement analogique, grâce à un protocole qu'on appelle communément CV/Gate. La note est contrôlée par un voltage de contrôle (CV). Plus le voltage est élevé, plus la note est aigüe (typiquement le standard logarithmique 1V/Octave). Le Gate est un signal binaire (ouvert/fermé), qui indique simplement qu'une touche est pressée.
Le CV/Gate est particulièrement indiqué dans le monde analogique car très simple à implémenter, et ne nécessitant aucun composant numérique. Mais, en ce début des années 80 où on commence à s'intéresser à la polyphonie, il y a plusieurs inconvénients inhérents à l'analogique pur. Le signal CV/Gate est purement monophonique (on ne peut contrôler qu'une note à la fois), et les oscillateurs analogiques ont tendance à se comporter comme des instruments à corde : en fonction de la température et au cours du temps, ils ont tendance à se désaccorder, donc plus on multiplie les oscillateurs, plus c'est compliqué de maintenir l'instrument juste.
Avec l'arrivée des premiers oscillateurs hybrides à la fin des années 70, de nouvelles possibilités s'ouvrent alors. La stabilité inhérente des contrôleurs numériques permet de multiplier les oscillateurs, filtres et générateurs d'enveloppe dans un instrument, ouvrant la voie à une révolution : la polyphonie.
Après quelques essais propriétaires entre la fin des années 70 et le début des années 80, le MIDI s'impose donc comme le seul et unique standard pour les synthétiseurs numériques et hybrides. Il est désormais possible d'effectuer une polyphonie quasiment illimitée, un seul contrôleur peut désormais piloter jusqu'à 16 instruments en même temps, il et possible de contrôler les paramètres de ces instruments en temps réel, etc.
Comme c'est un standard universel, pas de prise de tête. Quasiment tous les instruments électroniques des 30 dernières années implémentent le MIDI !
Mais le MIDI, en soi, n'est qu'un protocole de communication. En aucun cas on ne génère directement du son en MIDI. En vrai, on peut contrôler tout et n'importe quoi avec du MIDI, même de l'éclairage ou une mangeoire à lapins si on veut.
Il ne permet d'échanger que quelques types de messages. Les plus répandus sont :
- L'activation (et la désactivation) d'une note. Ce message comprend un canal, la note, la vélocité etc. C'est globalement un évènement qu'on provoque en appuyant (ou relâchant) une touche.
- Un CC (Control Change). Ceux quasi universels sont le Pitch Bend et la Modulation, mais chaque instrument a une liste de CC assignables sur le contrôleur. On peut par exemple contrôler un effet, un filtre, l'enveloppe etc. L'implémentation dépend directement du fabricant de l'instrument.
- D'autres types de messages comme les SysEx (System Exclusive Message), dont je ne parlerai pas car ils ne sont pas utiles à la compréhension de la suite.
Mais alors, c'est quoi le "son MIDI" ?On a vu que le MIDI ne générait pas de son, et était en réalité conçu pour contrôler tous types d'instruments électroniques, d'un NTS-1 au gros modulaire analogique (via un module de conversion MIDI => CV/Gate). Donc, parler de "son MIDI" reviendrait à réduire le son d'une guitare à l'influx nerveux contrôlant les doigts de son joueur, non ?
Quand on parle de MIDI dans le contexte des jeux PC des années 90, on parle en réalité du General MIDI, une norme qui date de 1991. En se basant sur le très abstrait protocole de communication datant d'une décennie, le General MIDI vise à standardiser la génération sonore, en particulier pour les jeux. Pour cela, il ajoute quelques contraintes et impératifs :
- Une liste fixe de 128 instruments et 47 percussions doit être implémentée. Cela signifie que quelle que soit la technologie de la carte son, si je veux un son de trompette ou de guitare électrique, j'aurai un son de trompette ou de guitare électrique, et pas le doux bruit d'une truite molle qu'on bat avec une babouche ou pire, rien. En revanche, l'implémentation de ces sons est totalement libre (wavetables, synthèse FM etc.), ce qui explique les différences radicales de rendu entre deux cartes son différentes.
- Une standardisation du nombre minimum de voix et canaux appelables simultanément, ainsi que des CC utilisables et des paramètres ils contrôlent.
Par conséquent, le classique "son MIDI", c'est les 128 presets mélodiques et 47 presets rythmiques, implémentés par les fabricants de cartes son des années 90, tentant d'imiter tant bien que mal nombre d'instruments réels avec des moyens techniques très limités, afin d'être compatibles avec un standard contraignant mais garantissant pour le compositeur qu'une
certaine approximation de son morceau soit écoutable sur tout appareil compatible. Et si ça sonne comme de la merde aujourd'hui, c'est parce que contrairement à l'époque des SoundBlaster 16 où la qualité des instruments simulés était un argument de vente, plus personne ne s'intéresse à ramener de la beauté dans ce protocole obsolète depuis 25 ans.