"Vos opinions sur les consoles modernes, je vous conseille de les utiliser en suppositoires."
Megaman 4
Capcom - 1993
La balade des gens heureux par Enker

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Encore un Megaman sur Game Boy, le quatrième de la lignée qui plus est ! Toujours au turbin, le petit robot continue de se battre contre l'infâââââme Dr. Wily, toujours présent pour éliminer quelques vilains robots et les forces du mal. Toujours plus que les autres en somme, c'est au choix un bel exemple de stakhanovisme, ou juste un bon petit fayot des familles.
Mais alors, que penser de ce Megaman 4 ? Un nouveau concentré de fun ou juste l'épisode de trop ? Réponse après cette introduction rondement menée.



D'emblée, Capcom annonce le ton en créant de toutes pièces une merveilleuse introduction animée qui se déclenche en laissant l'écran titre tranquille pendant quelques secondes. Pas de texte, juste des images pour notre plus grand bonheur : l'enfant qui est en nous accole le scénario qu'il imagine à ce qu'il découvre, des étoiles dans les yeux. Les méchants y sont présentés, y compris le vilain rival de cet épisode, un dénommé Ballade.
C'est joli, c'est rythmé et c'est surtout inattendu à un tel niveau sur Game Boy que j'en verserais presque une petite larme. Snif.



Après trois épisodes sur la portable, on est désormais bien rompu à l'exercice. Quatre adversaires sont proposés dans un premier temps, qu'il faudra occire avant de de débloquer une nouvelle section du jeu avec les quatre suivants. On tient nos huit boss réglementaires, plus un petit neuvième concocté spécialement pour l'occasion, avant l'affrontement final. Le petit quatrième n'échappe pas à la règle et son avenir est déjà tout tracé. Il ne faudrait pas pour autant lâcher un soupir de lassitude, croyez-moi, nous allons être servis. Et pas qu'un peu.

Sous ces apparences pour le moins traditionnelles se cachent en fait tout un lot de petites nouveautés, des éléments qui sortent clairement du lot pour nous surprendre. Si la formule principale reste bien figée dans le marbre, serait-ce donc sous le capot qu'il faut regarder pour comprendre ?



Dès le menu de sélection des niveaux, il est possible d'accéder au laboratoire du Dr. Light d'une simple pression sur le bouton select. Ici, et en bon papa poule qu'il est, il proposera au joueur peu doué de s'acheter des items pour avancer dans la partie. Acheter ? Oui, avec des pièces P que l'on ramassera dans les différents niveaux, soit directement à même le sol, soit sur le corps fumant des ennemis qui pullulent. Plus on collecte de pièces P, plus gros sera l'objet achetable évidemment, rien n'est gratuit en ce bas monde.
Le passage en boutique n'est absolument pas obligatoire, mais il dépanne tout de même pas mal lorsque l'on est à court de réservoir d'énergie ou de vie.

Mais là où le jeu frappe fort, c'est que ce système sera introduit uniquement à partir du septième opus de la série principale, sur Super Nintendo, en 1995. Soit deux ans après ce jeu Game Boy. Ah oui, quand même.



Comment ? Très accessoire ? Bon, soit, regardons du côté du jeu lui-même dans ce cas. La bonne nouvelle est que l'on se régale à traverser les niveaux, la réalisation est au top, un vrai travail d'orfèvre. Ca rame un peu par moment, mais on sent que la Game Boy est exploitée au mieux possible pour offrir le meilleur résultat possible. On pourra regretter le recyclage un poil trop récurrent de certains éléments, comme des salles qui se répètent en changeant juste un ennemi ou un item à l'écran, mais ce n'est qu'un petit bout d'un excellent ensemble, ça passe.
Je dirais même plus que l'architecture des niveaux est exemplaire, c'est un régal de sautiller dans tous les sens en faisant *piou piou* sur les cibles qui se présentent à la file.



Sautiller donc, car des trous et autres obstacles, il y en a à foison, toujours prêts pour nous tendre les bras vers une mort inéluctable. Mais on ne nous la fait pas, en tant que vieux loup des mers, nous savons jongler astucieusement au-dessus du vide en faisant fi du légendaire pixel près, lui aura été gentiment raboté pour nous offrir une marge de manœuvre un tantinet appréciable.
Donc on gambade tel un jeune lapinou, épris de liberté et amoureux des grandes étendues, avec toute la naïveté qui le caractérise car il ne connaît rien du monde et de ses chasseurs prêts à le transformer en civet ou en charentaises d'un coup de fusil. Ah ah, pauvres fous, mais dans ce jeu, c'est nous qui sommes le chasseur ! On virevolte par delà les précipices, tout en chargeant son super tir en permanence, prêt à fusiller les lignes adverses en pleine extension...

...ah c'est con, mais vous venez de perdre une vie en fait.



On ne l'attendait pas celle-là ! Pour pimenter un peu la sauce, rompre la monotonie et surtout rééquilibrer une arme sans doute trop puissante, le super tir a été agrémenté d'un léger recul. Vraiment trois rien, juste un ou deux pixels en arrière, en temps normal ça ne change strictement rien, mais plongé dans le feu de l'action ça peut surprendre. Et voilà comment on se fait bêtement avoir de temps en temps, en oubliant cette facétie, et en tombant comme une merde au fond du ravin alors que l'on avait initialement estimé à merveille la distance d'un saut. L'erreur est humaine parait-il, en tout cas ici elle ne pardonne pas.



En contrepartie, l'arsenal complet est non seulement très performant, mais surtout utile en fonction de la situation. L'arme de Ring Man permet par exemple de ramasser les objets à distance, celle de Toad Man peut éteindre les flammes. Là aussi, ce sont des petites nouveautés par rapport aux jeux d'origine qui apportent un vent de fraîcheur bienvenu et qui surprendront les habitués de la maison.



Tout cela, mis bout à bout, permet de traverser les différents niveaux avec bonheur, comme si leur architecture n'était pas assez réussie. Oui, je l'ai déjà dit plus haut mais je réitère ! Les tableaux sont chouettes, proposent un challenge varié et bien dosé, avec quelques fois des pics de difficulté bien sentis que l'on peut atténuer avec les différentes options mises à disposition. C'est rudement bien pensé et un passage infernal peut devenir abordable, même pour le moins doué d'entre nous. Oui, même toi !

Et en sus, ces mêmes niveaux repris des opus NES rivalisent d'inventivité pour nous surprendre. Que ce soit par exemple avec des plates-formes brillantes dans le noir ou des parois mouvantes et mortelles, tout a été imaginé pour ce jeu là afin de nous faire oublier qu'au fond, il ne s'agit que d'un portage. Mention au niveau de Napalm Man, où l'on chevauche des sortes de foreuses afin de progresser : non seulement c'est fun, mais c'est un détournement réussi à merveille d'un élément du jeu d'origine. Lumineux.



Terminons par des banalités de circonstance. La bande-son est chouette, la durée de vie excellente avec douze niveaux et une difficulté au poil, le scénario et la mise en scène sont travaillés notamment grâce à l'incorporation de petites cinématiques sympas comme tout. Le bonheur total du début jusqu'à la fin, qui en aurait justement mérité une meilleure s'il fallait mettre un bémol quelque part.



Le premier Megaman sur Game Boy avait posé les fondations de la série, mais proposait un challenge un peu court et était un peu chiche graphiquement.
Sa suite se voulait plus conséquente mais était surtout un bel assemblage de tout ce qu'il ne fallait pas faire.
Le troisième revenait sur de bons rails, mais souffrait d'une difficulté parfois complètement stupide et mal calibrée.

Megaman 4 débarque en réalisant un excellent consensus, récupérant les bonnes idées de ses prédécesseurs en incorporant ses propres améliorations, tout en ponçant dans le même temps leurs défauts pour proposer le résultat le plus satisfaisant possible. Il a tout du grand jubilé avant de sortir la tête haute, fier de ce qu'il a accompli, sans grande faute de goût et avec le sentiment du devoir bien fait. Une réussite totale de bout en bout.



Bref, si vous désirez jouer à la meilleure adaptation des Megaman NES sur Game Boy, ne cherchez pas bien longtemps : c'est celui-ci qu'il vous faut. Ce jeu est une merveille. Apprivoisez-le, chérissez-le, dîtes-lui des mots doux et il vous le rendra au centuple.
Le point de vue de César Ramos :
Après un avis si dithyrambique, que diriez-vous d'une petite douche froide ? Il est effectivement excellent, mais il est non seulement peu commun et son échelle de prix est démentielle. Quelle infâmie...