On nous disait en 1994 que la vie est une boîte de chocolat puisqu'on ne sait jamais sur quoi on va tomber, ce à quoi je répondrais qu'en effet, c'est ce qui arrive quand on va acheter des assortiments Franprix parce qu'ils sont en promo. Non, ce sont plutôt les étuis de jeux Gameboy qui parviennent encore après 15 ans à réserver quelque goûtue surprise au joueur curieux (ce que tout joueur digne de ce nom est censé être, n'est-ce pas), voir au goût de pisse à qui le méritera selon le divin jugement de César Ramos. Ne déconnez-pas avec ça, j'ai dû acheter un Mario is Missing pour 15€ une fois.
Il faisait beau, je m'étais levé pour rien ayant appris sur le tard qu'il n'y avait pas cours et j'allai d'un pas décidé faire un détour bien mérité au centre-ville dans un de ces cash converter où d'improbables merveilles nous guettent (à raison d'une merveille pour 20 jeux de foot sur snes). Moi ils me connaissent et ils me sourient quand il me voient arriver, ils savent que je suis de ceux qui les décharge de ces fardeaux d'une autre époque, ces ridicules boîtiers de jeux Megadrive qui prennent trop de place, ces cartouches NES tristement rangées au bas de l'étagère et les jeux gameboy qui prennent la poussière. (Ceci dit je les ai prévenus, 5€ c'est un peu cher)
Avec les consoles Nintendo et leurs jeux légendaires, on croit tout connaître, on ne feint même plus la surprise quand on entend parler d'un Zelda sur CD-I, d'un mix entre Fzero et Starwing sur Snes ou encore d'un Kirby sur Megadrive (rasseyez-vous, c'était une plaisanterie). Cependant je dois avouer m'être retrouvé les yeux comme deux rond de flan lorsqu'un Street Fighter II dans sa mignonne petite coque en plastique m'a adressé un bonjour poli. J'aurais dû m'en douter, quand le meilleur jeu de combat de la planète fait un carton sur Arcade et Snes, il n'y a pas de raisons qu'il ne soit pas décliné sur tous les supports du moment, même l'Atari a eu sa version, c'est vous dire... mais il faut reconnaître que les jeux de baston sur Gameboy (et sur consoles portables en général), ça ne court pas les rues, bien que je me soit fait avoir exactement pareil il y'a quelques mois avec le très sympathique Killer Instinct.
Ça par exemple, mais qu'est-ce que cela peut bien donner un tel portage, je vous le demande. D'ailleurs la réponse, c'est moi qui l'ait, il va donc vous falloir lire. Ça vous fera quitter un peu vos jeux vidéo ridicules et vos écrans d'ordinateurs qui vous rendent idiots, vous verrez ça vous fera du bien.
Je ne sais pas si vous vous rappelez, mais on parlait déjà de miracle devant la perfection de l'adaptation de Street Fighter II sur Snes et on sentait bien là que c'était exceptionnel devant la version Megadrive, toute aussi excellente mais enrobée d'une légère odeur de pet.
Les p'tits gars de chez Capcom pas assez talentueux pour bosser sur les consoles de salon ont donc eu pour job de convertir un jeu de baston technique et infaillible à tous les niveaux sur une console aux capacités loin d'être idéales, à savoir avec 4 niveaux de gris, 4 pistes stéréos et deux boutons d'action. Si vous avez déjà posé vos mimines sur les versions Atari ou Amiga, vous saurez un peu à quoi vous attendre, aussi, si vous êtes un compétiteur, un joueur professionnel, un de ces obstinés récitant par cœur tous les combos de Chun-Li, passez votre chemin. Street Fighter II GB est un parfait jeux de chiottes, puisqu'il a réussi à concilier aussi bien le plaisir de se la donner avec Ryu que celui de poser sa pêche avec une gameboy entre les mains.
D'un point de vue esthétique, nous connaissons suffisamment la Gameboy pour savoir à quoi s'attendre, cependant Capcom a fait du beau boulot. Les sprites des personnages sont très bien adaptés à la résolution réduite de la console, ni trop grands ni trop petits assurant une bonne lisibilité de l'action et les décors dépourvus d'animation (on ne leur en tiendra pas rigueur) sont fidèlement retranscrits. Je suis un casse-couille et j'ai toujours eu un problème avec l'évolution des Street Fighter et là, pas de bol, ils ont récupéré les bouilles des personnages issues de Super Street Fighter II, je ne saurais pas expliquer en quoi, mais je les ai toujours détestées. Au moins, ils nous épargnent les personnages inédites à cette version, l'autre ennui c'est que quelques personnages sont passés à la trappe puisque le casting se réduit à 9 combattants :
Les frères jumelles Ryu et Ken
L'inénarrable Chun-Li
Guile le beau et surpuissant
Blanka la bête humain en bermuda
Zangief le fidèle camarade
Balrog, ou le ravageur de mâchoire
Sagat l'infâme borgne et seigneur de tous mes cauchemars
M.Bison l'éternel bête noire de toute une génération.
C'est avec un regard chargé de regrets qu'il faudra se passer de Dhalsim, E.Honda et Vega dans cet épisode. Bwarf, le premier était un plouc du tier-monde, le second un obèse de trop dans ce monde qui n'a vraiment pas besoin de ça et le troisième, un de ces insupportables espagnols, du genre des Pablo/Miguel qui attirent inévitablement toutes les filles (y compris votre copine) dans un rayon de 500 mètres rien qu'avec un regard lointain et une chemise entre-ouverte.
Inévitablement, l'animation a méchamment été charcutée et les mouvements sont beaucoup moins fluides, mais suffisamment pour ne pas pourrir une partie, mais si vous êtes un oldies qui est passé par Street Fighter sur Atari, vous n'aurez peur de rien.
Là où Street Figther II tutoyait la perfection, c'était sur le plan des musiques, chaque personnage avait son propre thème qui allait marquer à vie quiconque les entendait. D'ailleurs ces thèmes étaient tellement parfaits que tous les remix destinés aux évolutions de Street Fighter ne tenaient pas la comparaison. Et bien là il faut reconnaître qu'ils se sont brillamment accommodés des 4 voies stéréo de la Gameboy puisque les musiques sont très fidèlement retranscrites et ont conservé leur charme et leur dynamisme, de quoi garnir votre la playlist chiptune de votre lecteur hors de prix.
Enfin, en terme de gameplay et c'est bien là l'essentiel, le champ d'action étant réduit à sa portion congrue (c'est vraiment une formulation de merde) les seuls boutons A et B n'ont pu permettre que « le coup de pied » ou « le coup de poing », dehors donc les stand MK, back FP link bas LP,LP,M-Kikoken. Ceci dit, c'est évidemment suffisant pour retrouver nos hadoken, sonic boom et tiger uppercut préférés, après tout je vous avait prévenu que SF II sur Gameboy était un jeu de chiotte et donc adapté en tant que tel. Des réflexes précis similaires à ceux qu'il faut adopter sur les supports dits « sérieux » sont tout de même requis, puisque le jeu reste relativement dynamique et très plaisant à jouer. On enchaîne les rounds avec un plaisir non dissimulé et, en raison de la faible difficulté de base, on apprend les bonnes manières à Marcel Bison juste après le plouf. On entre ses initiales, on s'essuie et vos prochains admireront cet authentique sourire de vainqueur se dessiner sur votre visage sur le pas des gogues.
Ah, et je ne vous ai pas dit qu'il y avait évidemment un mode versus supposant que vous ayez des amis possédant le jeu et un câble Link, pas d'bol, je n'ai pas d'ami et encore moins des connaissances possédant encore une gameboy et le jeu dont il est question.