Le site qui aurait préféré des pokemons.
Super Smash TV
Flying Edge - 1992
Now you're on TV, bitch par Fungus

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Comme précisé avec sagacité par son auteur dans le test de Vectorman, le futur c'est parfois loin d'être un sorbet à la banane. Notre monde n'est plus ce qu'il était et n'est désormais que l'ombre de lui-même. Toutes les valeurs les plus nobles de notre civilisation sont sauvagement piétinées par le stupre d'une société moderne décadente. Tenez, même les éboueurs ne passent plus que tous les 15 jours. Bref, tout part à vélo comme on dit. Heureusement qu'il nous reste la télé.



Mais attention, pas la télé que nous connaissons actuellement, insipide et consensuel bol de gruau que l'on nous sert à grand coup de louche sale. Non, je vous parle de la vraie télévision de divertissement, celle avec pénis monté sur vérin hydraulique et testicules en inox. Celle des hommes triomphant des affres d'un monde expurgeant les faibles. Celle des gladiateurs des temps modernes, l'idyllique vision futuriste de l'Amérique Réganienne, la consécration du libéralisme couplé à la loi de la jungle, de la savane et de la Corse réunies. Bref, nos années 80 chéries. Fuck yeah, si vous me passez l'expression.



Il est là. Grand, musclé, l'arcade sourcilière ne laissant la place à aucun doute quant à sa détermination. Il est ici pour triompher, pour entendre résonner les trompettes de la gloire. Il est presque à poil. C'est notre candidat, papillon attiré par le feu des projecteurs. Il entre dans l'arène pour être le seul, l'unique, l'Homme qui a Vaincu. Et pour ce magnifique salon en croute de cuir et ce rutilant magnétoscope. Gros plan sur la deux, retour plateau, souriez, vous êtes en direct sur Smash TV.



Pour vous donner un point d'ancrage, Super Smash TV c'est le carrefour entre Running Man et le Prix du Danger. Une impitoyable chasse à l'homme dans un environnement futuro-kitsch que seules les années 80 pouvaient nous offrir sur un plateau de plexiglass. Paillettes, strass et mutants. Le concept, les jeux du cirque passés à la moulinette MTV. Survivre ou mourir devant l'oeil jamais rassasié des caméras. Des arènes, des armes et votre paire de burnes, rien d'autre. Vous n'incarnez pas un gladiateur pour rien. Et un gladiateur de la manette, c'est ce que vous allez devenir, si vous voulez vivre. Un dur, un tatoué, celui qui est en première ligne lors des défilés de la CGT et mange des cordons-bleus 5 jours après la date de péremption. Parce que vous allez en chier toutes les larmes de votre corps. Oh oui mes petites salopes.



Héritage 80's oblige, Super Smash TV c'est mutant à gogo. Du beau, du gros, du qui bave sur son manche de pioche. J'en profite pour souligner au passage l'avantage du terme "mutant" que constitue son étonnante versatilité. C'est même une sorte de ragout dans lequel on peut y mettre à peu près ce que l'on veut, du moment que c'est laid et méchant. Dans le jeu, le panel va ainsi du soldat anonyme, parmentier à canon, au drone équipé de rôtisseur de fondement, en passant par le pétomane au shrapnel. Et ces amicaux compagnons ne sont qu'un modeste ordre d'œuvre dans le festin que l'on va vous envoyer dans la panse. Le point commun entre tous ces joyeux drilles : arriver par vagues entières et déterminées à faire de vos meules de la viande à kebab. Car des abominations en tout genre, on va vous en envoyer sur le coin de la hure par paquet de 24, avec les 20% gratuit en plus et à un rythme d'usine chinoise. Et c'est là que l'on titille du doigt le cœur du jeu.



Super Smash TV c'est un marathon, dans ce que la notion à de plus bête et éprouvante. On est moins loin du jogging dans un parc des Hauts de Seine que de la course de fond dans le centre de Sarajevo en 1992. On pourrait même parler de biathlon pour être plus précis. Vous savez bien, ce grotesque sport bâtard né des amours improbables entre le ski et le tir aux pigeons. Précision et endurance donc. La simplicité des règles ne se compare qu'à leur implacable exigence. Le moindre faux-pas, la moindre glissade sur la savonnette est sanctionnée dans l'instant. Dormir c'est mourir comme disait avec mansuétude Gilbert Selzmann. Jouer aussi en fait. La mort vous colle au postérieur comme les casseroles politiques à celui de Jacques Chirac et le jeu saute sur la moindre occasion pour vous tendre un croque en jambe rigolard. Il vous aura à l'usure, guettant le moindre signe de fatigue de votre part, vous usant jusqu'à la corde. Au sortir du premier niveau, vous êtes déjà lessivé, rincé, essoré et étendu à la grand corde des inconscients entrés dans l'arène (un peu comme François 1er). Très rapidement, vous n'êtes plus qu'une machine de viande, ramenée à un schéma primitif où seuls votre instinct et vos réflexes sont votre berger. Un "je te tiens tu me tiens par la barbichette" avec option fusil à proton.



Mais revenons à des choses plus bassement matérielles. Comme les performances techniques de la bête par exemple. Bon, visuellement nous aurons recours à une misérable pirouette sémantique et dirons que de toute façon, l'essentiel n'est pas là. Oui, en fait, c'est mollement beau. Allez, coupons la prune en deux en disant que c'est sobre. Les graphismes sont suffisamment propres pour rendre l'action la plus claire possible. On se focalise sur la visibilité. D'où du sprite légèrement taillé à la serpe et bénéficiant du minimum syndical pour l'animation. On aura la pudeur de se taire sur la finesse du reste. Ceci dit, l'animation sait rester fluide malgré la saturation de l'écran par les grappes de bestioles. Même limonade pour le son, les performances musicales du jeu se limitant groucho modo au thème principal, très entrainant ceci dit. Cela tombe bien à vrai dire, tout ce qui est susceptible de vous distraire peut vous couter la peau du postérieur.



Mais balayons ces peccadilles d'un revers de main goguenard. Hop. Pour la simple raison que, comme souvent sur Megadrive, l'intérêt est à chercher au-delà des performances techniques. Un peu comme Anne-Sophie, la petite binoclarde souffreteuse ayant subi la mesquinerie d'un assortiment génétique de second choix mais ayant un bon fond et même parfois un cœur d'or. Ne refaites donc pas la même erreur, en claquant la porte au nez de ce titre tel l'élastique du superficiel soutien-gorge de cette pauvre Anne-Sophie. Ce jeu est celui des joueurs des Temps Anciens, les stakhanovistes de la manette, les esthètes de l'affrontement mano à mano âpre et brut de décoffrage.



En définitif, ce Super Smash TV vous est-il indispensable ? Oui, triple oui. Parce que vous êtes oldies d'une part et que de ce fait vous êtes voués à engraisser un bric à brac aussi bigarré qu'inutile. Et que d'autre part ce petit jeu de Flying Edge (qui aura tout de même pondu de vilaines merdes dans sa carrière) a en définitif un sacré goût de reviens-y. Simple, exigeant et accrocheur en diable. Ceci étant, dès lors que le choix vous est donné, préférez la version Super Nintendo, logiquement plus aboutie techniquement et bénéficiant d'une meilleure exploitation de la manette. Mais las, vous étiez pauvres à l'époque et vous aviez une Mega Drive parce que ça coûtait moins cher. Faute de grive...

Le point de vue de César Ramos :
Accessible au commun des mortels, pour la moitié d'une misère.