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ToeJam & Earl in Panic on Funkotron
Sega - 1993
Keep that funk alive par Fungus

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
N'en déplaise aux esprits chagrins et aux bas du front, le mot suite ne rime pas nécessairement avec redite. Ce à quoi ces derniers répondront que cela rime également avec truite ou sodomite mais cela serait une honteuse digression dès la deuxième ligne de cet article. C'est intolérable. Suite n'est pas redite disions nous. C'est le cas du jeu qui nous intéresse ici. Troisième rejeton de la fine équipe de Johnson-Voorsanger Productions, il en est également le plus brillant, la cerise sur le tourteau même.



Là où le premier opus se présentait sous une forme originale, à savoir une approche de la plate-forme/aventure peu conventionnelle, sa suite décide de repartir sur les fondamentaux du genre. De la plate-forme dans sa plus simple expression. Oubliés donc les mouvements multi-directionnels des personnages, le coté exploration de territoires inconnus et la collection d'objets farfelus. Régression ? Ce serait aller bien vite en besogne. Car ce que le jeu concède sur le fond, il le reprend aussitôt sur la forme. Avec du rab.



Quid de l'histoire ? Quelques bribes d'information nous sont données dans l'introduction. Souvenez-vous : dans leur précédente aventure, « Slamming » Toejam et « Big » Earl devaient rassembler les pièces de leur vaisseau afin de quitter au plus vite un monde peuplé de fous, la Terre. Acte II : les deux aliens foulent à nouveau le sol de Funkotron, sainte patrie du funk galactique . Tout va donc pour le mieux. Tout ? Non, car un petit village d'Armorique résiste encore et toujours à l'envahisseur. Quelle rapport avec notre histoire ? Aucun, c'était pour voir si vous suiviez. Revenons donc à nos klingons. Funkotron est en danger. Peste. La cause ? De retour de la planète bleue, nos deux héros ont ramené par mégarde dans leurs soutes des spécimens de la pire espèce qu'il soit : des humains. Race foncièrement délétère par nature, la horde humanoïde ne tarde pas à déferler sur les terres funkotroniennes, avec la délicatesse d'une louche de mayonnaise sur un chemiser en soie. La population est terrorisée, les autorités dépassées, la nature bouleversée et on annonce de la pluie en fin d'après-midi. Sale journée. Pis que ça : le Funkapotamus, source universelle du funk, a fuit, laissant peu à peu la planète se vider de son funk. Et ce funk, c'est l'équivalent de la Force mais avec des trompettes et une ligne de basse. Sans cette précieuse sève, c'est la chienlit. La planète se meurt à petit feu, un peu comme le Parti Socialiste avec Lionel Jospin – la coiffure en mousse comprise. C'est à vous désormais de vous sortir le tentacule d'un de vos fondements pour réparer tout ce merdier.



Le décor est planté, place aux acteurs. Ils sont deux : ToeJam et Earl. Sorte de ruban de réglisse (goût fraise) sur pattes, le premier est un décalque de rappeur américain des années 80 : casquette retournée et gros médaillon de ce qu'on peut considérer comme son cou. Son collègue impose quant à lui une classe en fer forgé : torse nu, bermuda et RayBan. Funky en diable, donc. Aucune spécificité selon le personnage choisi, ils sont rigoureusement identiques : ils se trémoussent de la même façon et possèdent les mêmes aptitudes. A choisir par conséquent selon sont goût : le petit à casquette ou le gros à lunettes. Les protagonistes présentés, le spectacle peut commencer.



Vous débarquez sur Funkotron : ses vertes prairies, ces plaines mauves et ses forêts de klamoutz musicaux. Un paradis en Technicolor où la main grasse de l'Homme n'avait, il y a peu, pas encore posé le pied sale. Mais le voilà maintenant, laid, bête, nuisible voire même parfois à la peau pas très clair. Pas de Ministère de l'Immigration, ici on chasse le parasite à la main. D'ailleurs ce parasite, qui est-il ? L'Homo Sapiens Vulgus . Enfin, la notion d'humain est à considérer au sens large du terme. Très large même, voire carrément Guy Carlier. Vos premières rencontres sont plutôt soft : des enfants, tout ce qu'il y a de plus normaux. Des saletés sur pattes donc. Le premier modèle, caricature du gamin noir du Bronx, tentera de vous lapider à coup de tomates tandis que l'autre, petite teigne blonde, s'appliquera à vous pulvériser la rotule. Vient ensuite le couple de touristes, répugnante espèce parasite s'il en est. Leur spécialité : vous faire fondre la rétine à grands coups de flashes photographiques dans le museau. On commence à donner dans l'exotique avec le terrassier qui vous offrira une reprise de Good Vibrations en marteau-piqueur majeur. C'est à partir de là que les choses se gâtent. Car assez rapidement, vous allez rencontrer d'ignobles créatures composées principalement de mousse et de crocs : des caniches. Ils sont vifs, imprévisibles, hargneux et roses, mais surtout accompagnés systématiquement de leur effroyable maîtresse, grotesque et obèse. Cette dernière sera à éliminer après ces chiens, sous peine de subir l'ire de ces saletés pelucheuses. Tout ce petit monde concerne les premiers niveaux. Ensuite, vous allez en rencontrer de nouveaux. Et là, ça devient n'importe quoi. Vous allez devoir vous farcir des croquemitaines invisibles, des vaches ectoplasmiques, des sorcières armées de poudre hilarante, de chanteurs exhibitionnistes ou encore de canards sur tapis volant. Bref, ce n'est pas le moment de batifoler car vous avez du vin sur la manche pour vous débarrasser de tout ce petit monde.



Justement, entrons dans le vif du sujet, le déroulement du jeu. Rayon gameplay, on reste dans les clous : c'est de la plate-forme classique. Si si, c'est même très simple : votre personnage avance, il recule, comment voulez-vous que j'affabule. Les trois boutons de la manette sont mis à contribution, voire les 6 si vous êtes l'heureux propriétaire de la manette idoine. Six boutons pour autant d'actions différentes et autant, ou presque, de façon d'éradiquer la vermine. Quels sont-ils ces moyens justement ? Sachez que le destin de votre peuple tout entier repose sur le pot. Plus précisément celui que vous allez coller sur le groin de vos adversaires. Ici, pas d'armement surpuissant, de formules magiques dévastatrice ou de prêt à taux préférentiel, car il ne s'agira pas de pulvériser des escouades de terriens avides de sang et de congés payés. Non, votre mission consistera à leur coller ni plus ni moins la truffe dans un bocal. Bocal qui sera au final votre seul moyen de défense tout au long du jeu. S'ajoute à cela des armes secondaires inutiles mais rigolotes : un aspirateur qui sucera tout ce qui traîne à proximité et un bouton "panique" à utiliser en cas d'urgence. A la fin de chaque niveau, l'ensemble de vos terrines d'humains sera expédié par fusée loin dans l'espace où personne ne les entendra éructer.



Les envahisseurs n'ont pas tort sur un point : Funkotron est un lieu fort agréable à visiter. Lors de vos pérégrinations, vous serez amenés à traverser 14 niveaux, chacun vous donnant un échantillon touristique de la planète. Funkotron ce sont des mauves onctueux, des verts acidulés, des roses tendres et toute une palette de couleurs chatoyantes. Les noms des niveaux sont à l'avenant : ils respirent le funk. Jugez plutôt : Boogie Down Caves, Lower Funkytown, Slammin' Slopes ou encore le délicieux La Place du Funque. Visuellement la Megadrive nous sort le grand jeu, irradiant l'écran de couleurs, de sprites gigotants et de scrollings qui flattent la rétine. Pour vous donner une idée, on a l'impression que le jeu entier a été façonné avec de la guimauve qu'on aurait ensuite caramélisé. Le travail des graphistes fait honneur aux capacités de la machine, de telle sorte que l'on a l'impression de diriger un dessin animé au bout du paddle. C'est doux, rond et ça passe comme une fraise tagada avec un verre de Tang.



En dépit de tous les éléments sus-nommés, nous n'avons pas encore évoqué ce qui représente la clé de voûte du jeu, l'épice qui va vous donner envie de finir le plat. Si ce Toejam & Earl est un délice, c'est avant tout pour vos oreilles, tant le soin apporté à la bande sonore est important. Et pourtant le résultat n'était pas gagné d'avance si l'on prend en considération les capacités techniques de la console en termes de gestion du son. Que celui qui n'a pas senti ses tympans fondre comme de la margarine en jouant à Road Rash me jette la première bière. Oui, utilisé par un rustre aux oreilles pleines de cire le processeur sonore de la Megadrive peut s'avérer être une source de profit pour les audio-prothésistes. C'est synthétique à mort et ça rend fou. Sauf quand on évite de mettre une demi-burne sur le poste de musicien. Vous aimez le funk ? Si oui tant mieux. Si non préparez vous à être convertis à grands coups de solo de basse dans les esgourdes. Si les sonorités sont simples, les rythmes sont démentiels. Trompettes, basse, clavier, basse et autre klaber (cet instrument n'existe pas mais le nom sonne bien) s'enchaînent pour créer une ambiance unique et stimulante à souhait. La musique vous prend tout entier, s'immisce dans vos tripes et vous entraîne tout entier là où d'autres musiques Megadrive font la même chose mais ne vous donne qu'une bonne diarrhée. Vous sifflotez les mélodies, hochez la tête en cadence et vous finissez en train de gigoter la manette à la main. Restez assis, vous avez l'air ridicule comme ça.



La grande qualité du reste avant sont absence totale de pression sur le joueur. Attention, je parle de pression, pas de challenge. Le jeu est à l'image de Big Earl : il se joue à la cool. Traverser les niveaux s'apparente à une belle balade, un chaleureux jour de printemps, le solo de basse en plus. Pour autant, le jeu vous demandera de vous accrocher un brin, si vous désirez fouiller ses moindres recoins. Si vous pouvez parfaitement finir à la cool, il vous faudra vous touiller un minimum la semoule pour regarder le générique de fin la tête haute en arborant le sourire satisfait des hommes qui ne font pas les choses à moitié. Car challenge il y a. Rappelez-vous : le Funkapotamus, source du Funk planétaire, est aux abonnés absents. En fait, il se cache dans l'Hyper-Funk Zone, dimension parallèle et chatoyante dans laquelle il vous arrivera de vous aventurer lors de phases de bonus. A vous de le convaincre d'en sortir une fois la planète déshumanisée. Et il ne le fera qu'a une seule condition : qu'on lui apporte la célèbre collection des objets préférés de Lamont, sommité funkotronnienne. Objets qui sont bien entendu éparpillés au gré des niveaux que vous aurez à traverser, malicieusement dissimulés derrière des passages secrets. Fouillez, tâtonnez, débusquez, les passages peuvent être partout : derrière un mur, sous l'eau ou plus vicieusement sous vos yeux, pouf, mais sous la forme d'une porte invisible. Certains sont particulièrement retors et seul le funk-scan, sorte de détecteur infra-mauve, vous permettra de mettre le tentacule dessus.



Outre ce jeu de piste, l'aventure est truffé de petites friandises destinées à briser la linéarité de l'ensemble. A commencer par les mini-jeux, qui sont au nombre de trois, soyons précis bordel. Les Fungus (eh oui) Olympics vous permettront de vous adonner aux joies de la figure acrobatique sur champignon en mousse : le but étant d'effectuer les cabrioles les plus artistiques possibles avec notation d'un jury à la clé. Ce dernier ne déroge d'ailleurs pas à la règle universelle des jury, puisque qu'un des juges est toujours un enculé. Viennent ensuite les phases bonus se déroulant dans l'Hyper-Funk Zone où votre principale objectif sera de vous goinfrer de bonus avant d'être renvoyé sur le plancher des vaches. Pour finir, vous pourrez vous détendre les ventouses avec une session de Jam Out : un de vos compatriote, accompagné d'un ghetto blaster de bonne aloi, vous invitera à reproduire des rythmes à base de « shaka/boom/clap ». Le jeu vous fera également faire un peu d'exercice (ce qui n'est pas négligeable car vous avez pris du gras sur les fesses, soit dit en passant) en vous amenant à droite et à gauche pour collecter des bonus. Par exemple, il vous faudra secouer un flapurier (sorte de cocotier de la région dont les fruits ressemblent à des testicules encore qu'il se peut que je vienne d'inventer ce mot à l'instant) qui fera apparaître un parcmètre qui, après avoir été grassement rémunéré, déclenchera l'irruption d'un interrupteur qui a son tour vous mènera vers un panneau indicateur pour finalement secouer à nouveau un flapurier. Le tout pour au final ne récolter parfois qu'une poignée de points à la con. Inutile donc fun.



ToeJam & Earl fait partie de ces jeux qui donnent leurs lettres de noblesse à la machine qui les fait tourner en apportant une diversité salvatrice. Reposant tout entier sur son ambiance unique attachante, il est la garantie d'une soirée de plaisir, détente et bon esprit à la clé. Sans risque de maladie vénérienne. Classique et pourtant unique, cette petite friandise est l'indispensable élément pour agrémenter votre collection d'une touche de fantaisie, entre Chateaubriand et Fantomette. Il fait partie de ces jeux qu'on ressort pour le simple plaisir de se replonger dans son ambiance, pour se trémousser au rythme de ses mélodies diaboliques. Et je vous ai déjà dis de vous asseoir, vous avez l'air ridicule.



A propos de la musique

Je vous ai dit que la bande-son de ce jeu était une véritable merveille ? Comment ça oui ? Ha bon. Enfin, un ton en dessous tout de même jeune con, je n'aime pas la suffisance de votre ton et ce sourire qui germe sur le coin de votre peau grasse. De plus votre braguette est ouverte. Car ce que je n'ai pas dit en revanche, c'est que la bande-son a été éditée sur un album à part, dans la collection "Sega Tunes". Attention, ici, point question d'un vulgaire copié-collé des pistes du jeux. Les messieurs de chez SEGA ont fait les choses en grand et ont réorchestré tous les morceaux pour notre plus grand plaisir. C'est par conséquent génial mais en mieux. Le seul hic c'est qu'il vous faudra la malice du renard, la ténacité du bulot breton et la patience du poulpe mort pour réussir à le dégoter. Et je ne vous parle même pas de le dégoter à un prix décent, ça c'est une autre histoire.
Le point de vue de César Ramos :
Relativement rare, et souvent trop cher.