BOM DIGUI DIGUI DIGUI BOM, DIGUI BOM.
Popeye
Nintendo - 1983
I'm not Popeye the Sailor Moon par Fungus

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
La vie est une tartine de merde, le plus dur c'est de la chier, nous disait le poète. Quoique. Il arrive qu'un timide mais déterminé rayon de soleil perce cette couche nuageuse grisâtre qu'est notre quotidien de contribuables moyens. Et cette douce chaleur, c'est parfois [NES Pas ?] qui nous l'apporte. Soit bénie, ô douce source calorique des Internets. Prenez ce test par exemple. Une belle histoire qui prouve qu'en dépit de la crise financière et de Benjamin Castaldi, il est encore possible d'avoir foi en l'Homme et que la solidarité entre les peuples n'est pas encore un vain mot. Une larme d'émotion perlerait presque sur ma joue d'adonis si je n'écrivais pas cette critique dans une terne laverie automatique avec de vulgaires représentants de la plèbe comme vis à vis. Mais l'histoire n'est pas moins belle pour autant.



Une histoire qui commence un tôt matin d'hiver, juste après mon lever, vers 11h30. Bravant la morosité et la peinture défraichie du couloir de mon immeuble, je vais chercher mon courrier. N'attendant rien d'autre de l'austère boite métallique que des prospectus vendant les merveilles du monde occidental, des factures EDF et les habituelles menaces de mort, j'ouvre la porte avec un bâillement mou. Et c'est à ce moment précis qu'il m'apparut : beau, grand, le regard doux et irradiant de lumière. Après une poignée de secondes, il s'avéra que ce n'était qu'un employé d'EDF mal rasé qui venait relever les compteurs et qui était à contrejour dans l'embrasure de la porte. J'ouvre finalement la boite aux lettres et entre deux cadavres de lapins déposés par les gitans du quartier, je vois une étrange enveloppe à bulles. Hum. Elle pèse son poids. Je regarde l'expéditeur : "shipped from Meaux, Seine-et-Marne". Hum. Ma curiosité monte d'un cran. Fébrile, j'ouvre et découvre deux jeux NES me tendant les bras - ceci est une métaphore. Après quelques secondes de réflexion pour tenter de trouver une explication logique à tout ceci, c'est l'illumination : l'employé des compteurs vient de ressortir. Puis me vint finalement la réponse : ce ne peut être l'oeuvre que d'un seul homme, le preux Wonderpanzer. Wonderpanzer, l'homme qui prépare des cocktails basés sur une veille recette allemande utilisée pour le gaz moutarde. Et qui m'envoie deux jeux NES, comme ça à l'improviste, sans que je lui ai demandé quoi que ce soit. J'ai donc dans les mains Chip'n Dale et Popeye, ainsi qu'une alléchante promotion sur les laves-linge chez Conforama. [NES Pas ?], c'est aussi ça.



Popeye. Le marin au visage ravagé par la vigueur des embruns et le tabac bon marché. Le personnage dont la voix donnait l'impression qu'il mangeait un canard vivant au petit déjeuner. Et qui entretenait un béguin pour une Olive qui pourrait parfaitement être un travelo grossièrement maquillé. Viens se greffer à ce petit duo une sorte de gros singe engoncé dans un costume de capitaine et décidé à ravir la vertu de l'espèce de porte-manteaux susnommée. Voici la recette pour la plus formidable publicité pour l'industrie des producteurs d'épinards en conserve. Et qui passe à la moulinette du pixel au tournant des années 80.



L'adaptation de ce dessin animé sur NES, c'est une galipette vers une autre époque. L'époque de l'impérialisme de l'arcade dans le monde vidéoludique. Les cabinets gloutons en petites monnaie régnaient en maîtres et donnaient le la et la plupart des autres notes dans le secteur de l'amusement sur écran cathodique. Par conséquent, ce qui cartonne dans les salles enfumées et sentant la bière de table est rapidement transposé dans nos foyers, par le biais de cartouches remplies de bits et de bonheur. Et un style de jeu qui s'en ressent. Car l'arcade, c'est la cantine d'entreprise du jeu vidéo : simple, direct, cherchant avant tout l'efficacité. Du coup, le principe de ce Popeye ne casse pas trois briques à un canard. Chaque tableau suit le même axe : Olive est perchée dans un coin de l'écran et vous balance des items que vous devrez récupérer dans leur intégralité pour passer au tableau suivant. Cruelle réalité du monde du jeu vidéo, les choses ne sont pas aussi simples puisque l'ignoble barbu viendra tenter de vous empêcher de batifoler avec l'autre trumeau. S'en suit donc un chassé-croisé qui faisait le bonheur du public qui s'en tapait sur les cuisses dans les années 40. Trois décors et retour à la case départ. Hmm hmm, je vois. Le ludisme des origines : la bête course au point, le scoring de bas étage. Une résurgence des bas instincts, où l'homme ne se résume qu'à une suite de contractions musculaires prédéfinies qui se répètent en une sarabande infernale. Les niveaux s'enchaînent, avec une difficulté supplémentaire à chaque cycle. Ajoutez à cela les incontournables épinards pour botter le fion de l'espèce de Bud Spencer alcoolique, des éléments du décor utilisables comme vague moyen de défense et basta.



Coté technique, le jeu nous ramène au temps des ages farouches de la console. 1982, pensez-donc. Je n'étais à peine qu'un éclair lubrique dans l'oeil de mon père lorsque le titre est sorti en arcade. On est donc ici face à une version console qui se tire encore la bourre avec la Colecovision. Par conséquent, c'est du pixel par pack de 12, du fond noir et du minimum syndical pour l'animation. Même sanction pour l'environnement sonore : quelques misérables pépiements synthétiques et les mélodies concédées après passage par la case droits d'auteur. Une autre époque vous dis-je. Et la maniabilité est à l'avenant : du modeste à en rougir. Le champ d'action est réduit à sa portion congrue. On est tout de suite dans le bain, sans presque avoir eu le temps de quitter son caleçon. Quand je pense aux jeux actuels dont la première demie-heure est accaparée par une cinématique ronflante et un didacticiel pompeux, je pouffe discrètement et me reprends un Raider.



Après avoir enchainé quelques marathons du score, j'éteins ma console avec un petit sourire. Je repose avec douceur la coque de plastique nu sur mon étagère à babioles oldies. Il y a peu de chances qu'il s'engouffre à nouveau dans ma NES d'amour dans un futur proche. Elle aura droit à sa petite tape amicale de temps à autre, histoire de lui retirer sa robe de poussière. Mais elle est là, à une place qui lui revient de droit, telle une modeste brique dans le mur de l'histoire de la console. Ne serait-ce que pour prouver que les jeux NES n'ont pas tout de suite été aussi spectaculaires qu'un Kirby's Adventures ou un Megaman. Et puis c'est un cadeau. Tiens, ça m'a donnée envie de reboire une gorgée du défoliant orangeâtre de l'ami Wonder en son honneur.
Le point de vue de César Ramos :
Si peu onéreux qu'il pourrait apparaitre spontanément dans votre collection.