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Legend of the Ghost Lion
Kemco - 1989
Dans la jungle, terrible jungle... par Enker

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Lors de la dernière AG de NesPas (sur invitation uniquement, tu n’as pas reçu la tienne ? Elle était pourtant distribuée gratuitement sur la section cachée du forum) j’émis naïvement la remarque comme quoi je n’avais plus écrit de critique depuis longtemps. En fait j’aurais bien voulu le faire, mais ni l’inspiration ni la motivation ne brillaient en moi. Mais là c’était bon, je me sentais chaud, mais sur quoi ?
Ni d’une ni deux, Fungus sortit de sous la nappe un saladier rempli de petits papiers et m’invita à en piocher un. Devant l’insistance manifeste de notre joyeux luron de camarade, je plongeai ma main dans le récipient, quand, mû d’un doute soudain, je déclamai :
« Fungus, tu te souviens bien que le CD-i n’est pas critiqué sur Nespas ? »

Après avoir renversé la table dans un meuglement de rage, l’ami Fungus sortit insulter son assureur pour épancher son chagrin. L’intention était belle, mais je n’avais toujours pas de piste ! Devant ma perplexité affichée, le taulier posa sa main sur mon épaule et me suggéra de le suivre, ayant un truc pour moi *clin d’œil*



Non, ce n’était rien de déplacé ni de sexuel, je vous voir venir gros dégueulasses. C’est ainsi que je me retrouve devant vous pour parler de Legend of the Ghost Lion. « Mais qu’est-c’est donc qu’cette chose » me direz-vous dans un français sans doute moins approximatif, mais je ne voudrais pas frustrer les moins doués d’entre vous donc je récidive ! « Mais qu’est-c’est donc qu’cette chose » me direz-vous donc, et vous avez raison !
Paru au mieux sur le sol des Etats-Unis d’Amérique, ce RPG (eh oui) japonais est en fait l’adaptation vidéoludique d’un film sorti dans l’archipel sous le sobriquet de Waito Raion Densetsu -Piramiddo no kanata ni, ou encore Beyond the Pyramids: Legend of the White Lion. Profitez donc d’un instant culturel unique, car à l’instant où j’écris ces quelques lignes (4 avril 2019, 13h43) et après une recherche désespérément trop longue, il s’avère que la vidéo est toujours publiée sur Youtube.



Les plus facétieux d’entre vous auront peut-être remarqué que le lion fantôme du jeu était à la base un lion blanc tout con ? Ben oui, c’est comme ça les Américains, il leur faut toujours plus de sensationnalisme pour mieux vendre. Des trucs qui font peur, des trucs qui pètent, du cul, une ado en débardeur-legging… Oui, il y a bien une ado en débardeur et legging façon glam rock sur la jaquette US du jeu. MIEUX VENDRE JE VOUS AI DIT.
Bon. En l’occurrence, ils auraient pu rajouter une pin-up seins à l’air en hologramme que l’on aurait pu pardonner la démarche, tant le matériel initial est boiteux. Pensez donc : Legend of the Ghost Lion est un RPG.
Ca, je l’ai déjà dit, oui.

Oui. Mais un RPG pour débutant.



C’est mignon tout plein de vouloir faire un petit kit d’apprentissage. Ce serait même tombé sous le sens si ce jeu était sorti chez nous en son temps, rendez-vous compte du scénario idoine : un jeu en mode tutorial pour une zone défavorisée du monde qui ne connait pas le genre ! Alors que la cartouche est sortie aux USA en 1992, soit à la même période que Dragon Quest 4 (un indice : si c’est le quatrième, il y en a déjà eu d’autres avant), autant dire que les ricains étaient déjà rodés à l’exercice. Ca n’aide pas à forger une réputation solide, vous en conviendrez.
Au fait, vous ai-je dit pourquoi ce jeu était un RPG pour débutant ? Attendez donc voir, on va bien rire.

Dans tout RPG japonais qui se respecte, le joueur multiplie les combats afin d’engranger les points d’expérience, ce qui lui permet d’améliorer les statistiques de son personnage. Bref de le rendre plus fort pour rouler sur ces gobelins qui écument les départementales et les chemins vicinaux. Je ne vous fais pas un dessin, tout le monde connait Final Fantasy maintenant.
Voilà. Ca, c’est la base. Mais pas ici.



Legend of the Ghost Lion est au-dessus de la masse. Tout le monde distribue des points d’XP en tatanant du streum ? Ah ah, pas nous ! Faire des combats ne rapporte pas de points d’expérience. Jamais.
A la place, mutiler des ennemis en rencontre aléatoire permet de cumuler des pièces d’or. Oui, on peut vouloir faire dans l’originalité, mais dès qu’il est question de saborder ses convictions capitalistes, là il n’y a plus personne.

Rien d’extravagant me direz-vous, mais comment donc notre personnage deviendra plus fort si ces pauvres malheureux tombés au combat ne lui laissent que quelques Napoléon d’or ? En mangeant des Pépito ? Ah ah, vous ne croyez pas si bien dire. L’idée est que le personnage est et reste faible, seul son équipement lui permet de se démarquer de la plèbe. Il faut donc ramasser de la thune à foison pour l’échanger au mont de piété local contre des pièces d’armement rutilantes, ce qui améliorera en conséquence ses statistiques offensive et défensive. Et ouais.



Les moins lents d’esprit auront peut-être compris le problème. Si l’argent est la seule carotte des duels et que l’on a déjà pillé les boutiques, pourquoi diable se décarcasser à faire des combats supplémentaires sans aucune perspective ? Voilà, le mal est profond. Une fois l’objectif pognon atteint, ce jeu ne présente plus qu’une succession pénible de combats lents et inutiles, dont la seule garantie est de pouvoir perdre des points de vie et au cours desquels la fuite sera une option à retenir, mais pas forcément synonyme de succès. Youpie tralala.
Heureusement il sera possible d’étendre la quantité de points de vie en trouvant des bonus communément appelés fragments d’espoir et qui, surprise !, représentent les niveaux. Ils sont en nombre défini (très exactement 25), cachés dans des coffres un peu partout au travers de donjons secondaires et mal inspirés, mais dont la traversée devient obligatoire afin d’obtenir des arguments suffisants pour pouvoir décrocher la victoire finale.

Bref, il faut se fader des combats inutiles dans des longs couloirs vides pour rallonger sa durée de vie, et ainsi espérer pouvoir améliorer son endurance pour subir plus de combats inutiles dans des couloirs vides plus longs. Youpie tralala (bis).



Voici l’idée générale du jeu et pourquoi il est pénible. Un des principes élémentaires du genre a été retiré dans un souci de simplification, mais son remplacement ne va pas dans ce sens. Ce RPG pour débutant en devient une course d’endurance sans grande motivation. Alors oui, c’est plus facile, mais qu’est-ce que c’est chiant…

Si encore certains points pouvaient rattraper ce gadin annoncé, mais même pas. Graphiquement c’est assez quelconque, mais pas forcément plus moche que ce qui se faisait à sa sortie japonaise. L’écran de combat est une pure inspiration de Dragon Quest, avec un affichage fenêtré et le méchant vu de face. Les sprites y sont assez gros, bien qu’ils ne ressemblent parfois à rien mais l’effort est appréciable. Par contre un seul ennemi ne peut être affiché à l’écran, du coup on a parfois l’impression qu’il n’a qu’un seul monstre à abattre alors que le menu contextuel en indique bien plusieurs. C’est pour le moins déroutant.



Transition idéale pour parler du point positif –renversement de situation !–, à savoir le système de combat. Intrinsèquement il n’a pas grand-chose de différent comparé à la masse : du tour par tour dans la plus grande tradition japonaise, chacun porte ses coups et le plus faible meurt en premier. Mais ici, la subtilité vient du fait que notre personnage peut invoquer des esprits afin de se battre à ses côtés ! Et ça, c’est assez ouf car assez inattendu dans cet océan conventionnel.
L’action dépense des points de rêve (extensibles via les fragments d’espoir précédemment cités), tandis que chaque nouvel intervenant dispose de sa propre espérance de vie. Du coup on en vient à contrôler plusieurs combattants, les combats en deviennent plus simples, c’est sympa. En revanche ce jeu souffre d’un mal commun aux vieux RPG, à savoir que les ennemis restent ciblés pour un tour, même après leur disparition. Les habitués comprendront, mais il est horripilant de perdre une ou deux actions dans le vent alors même que l’infâme affreux vient d’être occis.



On pourrait se quitter sur cette (presque) bonne note, mais –transition toute trouvée– nous allons tout de même parler bande-son et chiptune. Celle-ci est un peu à l’image du jeu, plutôt fade et plate. Comme l’ado de la jaquette en fait, tout est lié et Jean-Luc Lahaye valide cette métaphore !
Si la musique de la carte est plutôt guillerette, elle finit hélas par lasser bien vite, mais son principal souci n’est pas là : elle sera sans interruption coupée par ces fameux combats qui, vous le savez déjà sont usants et agaçants, se déroulent sur une piste absolument odieuse. Une boucle crispante et ô combien répétitive qui s’installera insidieusement dans vos cerveaux, pour que l’influx nerveux à l’apparition d’un ennemi et des premières notes qui l’accompagnent envoie ce message de survie « OH PUTAIN FAUT QUE JE FUIE ». Comme l’aurait dit Brice H. en 2009, un affrontement aléatoire avec sa musique de merde, ça va. C’est quand il y en a plusieurs que ça pose problème.



Bon, voilà, je crois que l’on a fait le tour. Mais je n’ai pas parlé de l’histoire au fait ! On et dans un RPG, ça compte ! Mais vous savez quoi ? La fille émo-punk legging moche de la jaquette, en fait c’était elle l’héroïne ! Twist ultime ! Une fille ! Dans un jeu-vidéo ! En 1988 ! Mais mon horizon de vie est complètement bouleversé, chamboulé ! Une p’tite jeunette, que l’on dirige, pour accomplir une quête noble ! Alors ça parle de quoi ? De monde à sauver, de cristal de paix à sauver des griffes d’un maître-dragon, d’une raclette au ski ?

« Les parents de Maria, partis sur la piste du lion fantôme, ne revinrent jamais de leur expédition. La jeune fille, bien décidée à secourir son papa et sa maman, se lança dans un monde hostile à la recherche de la créature maléfique. »

Ah ben tiens, c’était inspiré ça.
Bon écoute cocotte, la prochaine fois que tes parents se barrent pour aller flirter dans les fourrés de la maison de campagne, tu es gentille, tu fais comme tous les ados : tu invites tes copains à la maison et tu descends tout le stock d’alcool de papa en mettant du Nirvana à fond dans les baffles.

...

Et surtout, TU NE NOUS FAIS PLUS CHIER AVEC TES JEUX DE MERDE. Merci.



Bon, j’avoue, j’exagère *légèrement*. Ghost Lion n’est pas si pourri que ça, il est juste quelconquissime. En fait il aurait très bien pu faire meilleur effet ; ses innovations et tentatives de bien faire restent trop peu exploitées, mais c’est surtout son faux rythme qui l’achève. C’est bien la première fois que je ne vais pas jusqu’au bout d’un jeu avant de publier une critique, mais cette fois-ci et malgré toute ma bonne volonté… je m’emmerde grave. Je parlais plus haut de course à l’endurance, j’ai joué et j’ai perdu.
Les idées sont séduisantes et la magie de la découverte opère les premiers temps, jusqu’au moment fatidique où l’on comprend que chaque section du jeu n’est qu’un éternel recommencement fastidieux et pénible. Du coup pouf, j’arrête là. Cette critique n’en a que trop duré et la vie est trop courte pour s’encombrer des trucs inutiles.
Moralité ? Apprenez à dire non. Pas comme moi.
Le point de vue de César Ramos :
Fantomatique dans nos contrées...