"Guru Meditation #00000004.0000AAC0"
Donkey Kong Country
Rare - 1994
la perle rare par Mario86

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
1994. Par ordre d'importance des faits, l'année de la mort d'Ayrton Senna, de la sortie de Pulp Fiction, dusuicide de Kurt Cobain, du génocide rwandais, de la Cité de la Peur, et de Donkey Kong Country. Oul'inverse. Onze ans après le dernier jeu vidéo mettant en scène les aventures d'un primate pixélisé vite renvoyé aux oubliettes par ce gros rital moustachu à casquette rouge, Donkey Kong revient. Plus gros que Stan Laurel, plus ingénieux que Jean-Claude Vandamme, plus classe que José Bové, c'est le DK nouveau, en trois dimensions. Fourni avec cravate rouge de rigueur.



Rareware est un développeur pour le moins néophyte en la matière, et quand on apprend qu’ils planchent sur le projet d’un jeu de plate-forme qui va carrément nous faire oublier Super Mario World grâce à des graphismes en 3D plus vraie que nature, on a de quoi croire un peu au foutage de gueule. Nonobstant cela, le tapage médiatique est énorme pour la promotion du jeu. Rare a mis le paquet financièrement pour accoucher d’une bombe révolutionnaire dans l’histoire du jeu de plate-forme. Pas facile comme pari pourtant.



Ressortir un perso de jeu plutôt obsolète malgré une présence de son rejeton boulimique dans Super Mario Kart deux ans plus tôt, c’est osé. Alors, ils ont pensé à jouer sur l’archaïsme évident de ce gorille englué sous la poussière et les toiles d’araignée. Il s’appellera Cranky, aura une barbe longue comme sa canne et sera un vieux chieur gâteux. Quant à son gamin devenu grand, gros, fort, etc., il est le nouveau roi de la jungle, et pour s’affirmer, il a troqué le débardeur à la con de SMK pour une cravate rouge du plus bel effet.



Notons que dans son incroyable répertoire de gestes, quand il ne joue pas aux Tarzan à cravate, il se frappe les pectoraux au bout de 10 secondes d’inactivité en poussant des cris simiesques. Probablement sa façon d’appâter la femelle (c’est pas avec une pine pas plus grosse qu’un couteau suisse de poche qu’il va y arriver) ou d’effrayer les ennemis. Ou de rappeler à l’ordre le joueur qui a lâché son pad pour baver devant l’incroyable rendu graphique des différents univers proposés (jungle, forêt, sous-marins, grotte, montagne, mine, usine...)?



Car oui, venons-en quand même au fait, ils se la pétaient autant que leur perso chez Rare, mais force est de constater qu’ils avaient raison, et là faut leur baiser les pieds. Ils n'ont pas menti: c’est de la VRAIE 3D! La palette d’animations est énorme, la profondeur des décors n’a rien à envier à celle des réflexions des Lumières, la gestion des sprites est un modèle du genre. J’estime qu’après m’être étendu là-dessus, il serait superficiel d’ajouter que les déformations d’écran des stages aquatiques vous arrachent un regard similaire à celui d’un ado qui voit pour la première fois sa copine à poil. Ah ben tant pis, je l’ai dit, mais comme ça m’a fait cet effet-là, je me suis dit que je me devais de vous faire partager mes impressions.



Dékacé innove en tous points par rapport aux Mario de plate-forme, qui à la longue deviennent répétitifs vu qu’ils présentent tous le même système d’options et de personnages. Là, les briques en tous genres sont remplacées par des tonneaux, et les pièces par des bananes. C’est pour le « jungle spirit », baby. Quand on rajoute à ça les vieux pneus enfoncés dans le sol qui font office de trampolines, on se dit qu’ils avaient vraiment de l’imagination, les gens de Rare. Même si le principe de l’équation 100 bananes = une vie supplémentaire est pompé sur les Mario, tout ça donne un joli coup de neuf.



Au fait, c’est quoi le but de ce jeu? Bah comme tout soft de plate-forme, le scénario est pas reluisant, mais il a le mérite de s’émanciper du cliché assez barbant de la princesse kidnappée par un vilain monstre. Enfin quoique, ça dépend, si vous pensez qu’un stock de bananes vaut une princesse, DKC reste dans le moule.



Car le monstre final qui a osé dérober l’incroyable réserve du roi des Kon(g)s — une réserve qui représente à peu près autant de bananes qu’il y a de pièces dans la piscine de Picsou — est non seulement vilain mais laid; il dirige une tribu de reptiles démoniaques nommés les Kremlings, à qui DK et son bambin à casquette Diddy ont bien l’intention d’aller faire une jolie tête au carré (ce qui, soit dit en passant, ne les rendra pas plus laids qu’ils le sont à la base). Notez au passage la subtilité du blaze de ces racailles de la jungle: une savante fusion entre le Kremlin et les Gremlins. Encore une bonne illustration de l'étendue de l'imagination des concepteurs du soft.



Tiens, un truc que j’ai pas dit, c’est que Donkey Kong Country bénéficie d’une des bandes son les plus accomplies de la console. Le thème principal de la jungle est incroyablement rythmé, on danserait presque dessus. Si vous êtes à une soirée et que vous avez la possibilité de jouer aux DJ, mettez à lire le CD de la bande originale offert dans la version portable du jeu et foutez un max de basse sur ce morceau. Ça te prend le corps, ce truc. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai paumé ma toute première vie dans ce jeu comme un con: je devais danser avec mon pad à la main sans me soucier du fait qu’un Kremling se payait ma tête pendant ce temps-là. Mais en progressant dans le jeu, on se rend compte que l’ambiance musicale colle parfaitement à l’univers visuel. La mention spéciale est à adresser au thème aquatique, là c’est carrément les musiques d’Éric Serra pour le Grand Bleu en version 16-bits.



Et alors, devant cet étalage de richesses technologiques, il paraît presque évident que DKC va se ramasser la gueule niveau de vie, comme beaucoup trop de jeux super bien foutus. Ouais mon coco, mais là on est sur SNES. Donc sur une console oldies (malgré les apparences, car pour le coup, DKC laisse un peu sur leur faim les drogués du pixel). De ce fait, graphismes-avec-lesquels-on-jouit, ça rime avec putain-de-durée-de-vie... comment ça, ça se voit que j’ai cherché à faire une vraie rime? En tout cas, on m’enlèvera pas de l’idée que ce jeu occupera son heureux possesseur pour de nombreuses heures. Si la quête de base souffre un peu d’une linéarité classique et est un peu simple malgré l’absence de raccourcis, le joueur tout fier d’avoir défait le boss final va se prendre une bonne baffe de la part de DK en apprenant qu’il y a un challenge bien plus intéressant, à savoir finir le jeu à 101%. Si si (disait l’impératrice... bah quoi y en a bien qui font la vanne sur les Chemical Brothers, j’ai le droit merde!(NDLR : pour craner en soirée, sortez un blague a l'humour aussi glacial que sophistiqué : "c'est moi qui m'y colle, brother". Seul les fanatiques de musique peuvent comprendre...), 101%. Comme la note que ce jeu mériterait — ou presque — dans tout canard dédié au monde des pixels, sprites & glitches (tiens, on pourrait donner ça comme surnom au PSG). Allez, je ne vous en dis pas plus, je vous réserve la surprise, même si ce soft exceptionnel en contient déjà beaucoup.



Vous noterez que tout au long de cette critique, je n’ai pu résister à vous dévoiler mon obsession pour la cravate rouge de DK. Cet ultime paragraphe totalement inutile est un moyen très habile d’insérer un screenshot de plus et de conclure par un « You know where the fuckin’ you are? You’re in the jungle, baby! »

Le point de vue de César Ramos :
Commun, mais RAREment donné