Un ver de terre. Un héros de jeu vidéo. Les deux mélangés. Un ver de terre héros de jeu vidéo. Il n’y a rien qui vous choque ? Même pas un tout petit peu ? Non ? Bon. Je crois qu’il faut mettre certaines choses au point. Pour ceux qui ne savent pas, un héros c’est quelqu’un qui vit de grandes aventures. Généralement, un héros de jeu vidéo est un surhomme. Il a des capacités extraordinaires qui lui permettent de passer outre tous les dangers. Il est soit terriblement intelligent soit magnifiquement agile soit fantastiquement fort. Or ici on parle d’un ver de terre qui est le héros d’un jeu vidéo. Non ? Toujours pas ? Je vois. Donc pour les derniers idiots qui ne le savent pas encore, un ver de terre c’est ça :
Ca respire l’aventure hein ? On sent toute la puissance du personnage là, cette profondeur d’esprit, ce corps d’athlète, ces muscles d’acier et ce regard viril. Tout d’un héros. Non ? Je vois que vous avez enfin compris, à la bonne heure. Donc oui, un ver de terre héros de jeu vidéo ce n’est pas possible. Le ver peut en effet être décrit comme l’antihéros par excellence : il est mou et n’a ni cerveau, ni super pouvoirs. Seulement, Jim, notre héros du jour, il a une combinaison bionique. Du coup, il a un super pouvoir. Et des gros flingues. Il est donc à la fois un ver de terre ET un super héros, tout ça grâce à une combinaison bionique. Si je tenais l’idiot qui a dit que l’habit ne faisait pas le moine, je lui rirais grassement à la face tiens. Notre super héros s’appelle donc Earthworm Jim, c’est un ver de terre et il a la mega classe dans sa super combinaison bionique qui lui confère des supers pouvoirs. Rien que ça, on sent qu’on va rire.
Rire, c’est bien le mot. Car oui, Earthworm Jim 2 est poilant ; on se fend la margoulette du début jusqu’à la fin. Ce jeu est une ode à l’humour, bien plus que le premier d’ailleurs (oui parce que le 2 à la fin du titre ce n’est pas un effet de style, ça veut dire que c’est la suite du numéro 1, que vous a-t-on appris à l’école ?). Earthworm Jim 2 ne se contente pas d’être une simple suite du premier opus des aventures du lombric bionique : il corrige ses défauts les plus flagrants pour en faire une bombe vidéoludique. Ainsi, la première différence notable entre les deux jeux est l’ambiance qui y règne. En effet, même si l’humour était très présent dans Earthworm Jim premier du nom, ce dernier conservait une atmosphère sombre et plutôt axée adulte. Dans le second épisode, on a affaire à un univers beaucoup moins mature, plus cartoon. Les personnages sont beaucoup plus expressifs, le nombre de « répliques » et de mimiques de Jim s’est considérablement agrandi. Les niveaux sont plus colorés, moins sombres ; Jim est beaucoup plus clownesque. Ajoutez à cela une animation sans faille et très vite vous atteindrez l’extase. De même, les musiques sont plus joyeuses et surtout plus nombreuses. En effet, on retrouve moins souvent la même musique dans les différents niveaux : presque chaque niveau a sa propre musique, ce qui permet de mieux s’imprégner de l’ambiance propre à chacun d’eux. Certes on pourra trouver l’environnement musical moins rock que celui du premier opus mais la qualité reste au rendez vous, notamment avec quelques musiques classiques bienvenues. Ecoutez un peu la musique du niveau « Villi people » pour voir. En clair, Earthworm Jim 2 est un régal pour les yeux et les oreilles.
Cependant la réussite esthétique ne fait pas tout (Même le plus beau des aquariums lasse au bout de trois quatre heures de visionnage. Si si : essayez). Pour prendre conscience de l’ampleur de la puissance de ce jeu, il faut aussi se tourner vers le gameplay et le level design. Et de ce côté, on a affaire à du lourd, du très lourd, aussi lourd que le cousin Justin quand il essaye vainement de se taper la cousine Marguerite au mariage de l’oncle Albert : on s’est pas foutu de votre gueule. Jim n’a pas glandouillé entre les deux opus : il s’est entrainé dur, le bougre. S’entrainer signifie devenir plus fort, plus rapide mais aussi acquérir de nouvelles aptitudes. Ses nouvelles capacités, Jim les doit à un machin vert gluant non identifié qu’il s’est fait greffer dans le dos. Ce flubber a deux utilités : premièrement, il remplace la tête hélice qui permettait à Jim de planer après un saut par un parachute certes moins amusant mais plus facile à enclencher. Ensuite, et c’est le point le plus important, il peut servir de grappin. En appuyant sur le bouton A lors d’un saut, flubber se déploie et peut s’accrocher à des taches de slime au plafond pour s’y balancer comme au bout d’une corde. Je sais, dis comme ça cela fait un peu je me sers de mes crotte de nez comme d’une liane alors que ce n’est pas du tout comme ça dans le jeu. En fait si ça donne exactement cette impression mais je m’en voudrais de vous dégouter d’un si bon jeu avant même que vous n’y ayez touché alors on va faire comme si.
Jim ne s’est pas juste entrainé, il a aussi fait les courses. Là où dans le premier opus on n’avait qu’un seul petit flingue malheureux avec un pauvre upgrade qui reniflait un peu de l’arrière train, on a maintenant affaire à tout un arsenal foutrement garni. De la main tri-mitrailleuse à la bombe ultime en passant par le pistolet à bulle totalement inoffensif, inutile et donc à ce titre absolument indispensable, il y en a pour tous les goûts. A vous les joies du zigouillage massif d’extraterrestres et autres corbeaux dans l’allégresse et la bonne humeur.
On pouvait reprocher au premier opus la longueur de ses niveaux. Ils paraissaient certes originaux au premier abord mais il fallait bien avouer qu’au bout de quelques minutes, perdu dans un dédale qui semblait sans fin, on s’emmerdait un peu pour être honnête. Les niveaux du second opus sont assez longs pour avoir le temps de s’imprégner de l’ambiance tout en étant assez courts pour éviter la lassitude. Jim se dirige avec aisance dans des niveaux aux multiples surprises et autres coins secrets. Car oui, le jeu vous réserve quelques surprises. Outre les gags toujours de très bons goûts comme les vaches explosives ou les bureaucrates sados masos, chaque niveau décèle des pépites de game design. Des bonus cachés, des missions différentes à chaque fois, gameplay renouvelé, des cheat codes foireux… Autant de moyens peu honnêtes trouvés par les développeurs pour vous empêcher de lâcher la manette. Et force est d’avouer que c’est bigrement réussi.
En clair, Earthworm Jim 2 a tout d’une bombe : graphismes scintillants, musiques fabuleuses, humour caustique, niveaux ingénieux et gameplay parfaitement huilé. Ce n’est pourtant pas le jeu parfait, et ce pour une seule et unique raison. Si vous avez lu mes précédents tests, vous savez d’ores et déjà que je suis maudit : mes jeux préférés ne sont jamais doté d’un quelconque système de sauvegarde ! Une vingtaine de niveau et même pas le moindre petit système de mot de passe. Et ça, quand on n’a pas le droit de beaucoup jouer « Parce que demain il y a école, t’as des devoirs et en plus t’as déjà regardé les Minikeums et ce soir on sait que tu voudras voir Batman après les infos », c’est pas cool. Pas cool du tout. Surtout pour un si bon jeu. Et ce n’est pas la version GBA buguée jusqu’à la moelle qui changera cet épineux problème. Que cela ne vous empêche pas toutefois d’acheter ce jeu, il faudrait être mad, ou très con, voire les deux même pour s’arrêter à ce genre de détails. Et puis nous sommes des oldies aguerris, pas des morveux : finir un jeu d’une seule traite ça s’est fait et ça se fera. Alors faites pas chier et achetez, c’est un ordre.
Le MU du jour
Oui, Earthworm Jim contient un mythe. Une séquence fantastique qui m’a fait rêver étant gamin et qui me fait toujours rêver. Je me souviens encore ces mercredis après midi où un ami passait à la maison et où nous jouions à EWJ 2 dans un seul et unique but : jouer au niveau Puppy Love. Nous avions même recherché le code pour choisir son niveau uniquement pour ce niveau.
Le principe ? Il est simple : d’un côté la maison du grand méchant qui a kidnappé une tripotée de chiots, de l’autre côté la maison du « gentil » papa chien. Au milieu, Jim, qui na rien demandé. Il est équipé d’un pouf aux propriétés élastiques assez surprenantes : un chiot lancé à une hauteur x et rebondissant sur le pouf remontera à l’altitude x et ce quoi qu’il arrive. Voilà une règle de mécanique qui ravirait bon nombre d’étudiants en filière scientifique. Bref. Le grand méchant est à tendance sadique : il adore jeter des petits chiots par la fenêtre, le fourbe. Le boulot de Jim est, à la manière d’un Fire de la grande époque, de faire rebondir les petits chiots jusqu’à leur paternel avant qu’ils ne s’éclatent contre le sol et que papa ne vienne vous défoncer votre sale gueule de ver pour vous expliquer que quand on essaye de sauver ses enfants, on le fait bien. Il est d’ailleurs bon de noter que papounet ne fera pas subir le même sort au dognappeur alors que ce dernier prend un malin plaisir à envoyer l’objet de son larcin par la fenêtre. J’ai toujours pensé que les chiens étaient étranges.
Outre la qualité évidente qui incombe à un clone d’un game et watch aussi bon que Fire, le mythe de Puppy Love tire sa saveur d’ajouts délicieusement funkys. De un : la musique est une tarentelle divinement entrainante et correspond parfaitement à l’ambiance. De deux, et c’est là l’aspect le plus important, j’adore le bruit du chiot se démembrant dans une explosion verte et gluante lors de sa rencontre avec le sol. J’aime ce proatch, si typique du « ha putain je viens de marcher sur un nid de limaces ». J’aime cette animation qui vous donne l’impression que les chiots ne sont que des bombes à morves. En bref, voir crever ces mignons petits clebs était et est une source de plaisir intense. Ce quart de seconde où les canidés disent au revoir à leur morne existence justifie à lui seul l’achat du titre.
J’ai toujours préféré les chats.