Je ne sais pas pour vous, mais j’aime bien ces vieux jeux bien antiques du début de la NES. Soccer, Volleyball, Tennis, Pro Wrestling : des titres bien évocateurs qui ne laissent que peu de place au doute quant à leur contenu. Un peu comme si le service restauration au budget limité d’une colo de trois jours pour trente-cinq personnes lançait un menu quotidien unique « Oignons », on sait à quoi s’attendre.
Dans le lot, il n’y a guère que le très médiocre 10-Yard Fight qui fait preuve d’imagination dans son titre. Ce nom très poétique et métrique inspire essentiellement à mes conquêtes mon fier attribut masculin, mais pourtant c’est bien un jeu de football américain, ce qui est tout à fait raccord car il permet d’opposer deux équipes de glands.
Et si ce Baseball dont il est question aujourd’hui profite de ce bon vieux titre vendeur et flemmard des familles, c’est du côté de la culture US qu’il va falloir aller piocher pour en savourer la substantifique moelle.
Coupons tout de suite court au suspense : je ne connais rien au jeu de baseball. A vrai dire, il m’indiffère même totalement. Un sport où le pays qui en le porte-étendard se fait dominer par le Japon et Cuba est soit une sorte de remake hasardeux de Nagasaki et de la baie des Cochons, soit un non-sens total.
C’est donc un hasard complet si j’ai cliqué sur l’icône de ce truc dans le menu de l’application Nes online de ma Switch. Un moment d’égarement certainement, mais aussi et surtout la motivation de trouver un titre pour écrire une critique rapide pour le site. Parce que oui, hein, on ne va pas se leurrer, un jeu de sport avec un titre aussi évasif ne va pas être des plus compliqués à appréhender.
Tout commence par un écran de titre toujours aussi roots, bien représentatif de la fameuse collection des « Sport series ». Fun fact : Baseball est le premier titre de cette série à avoir été publié, au Japon tout du moins. Aux USA, il est sorti dans la masse anonyme des jeux de lancement de la console. Et pour l’Europe, je n’en parlerai même pas, puisque seule l’Espagne aura vu le bout de son nez dans les rayons, mais qui s’en plaindra ?
Donc un écran tout ce qu’il y a de plus roots, un joueur, deux joueurs, on choisit de jouer seul parce que bon faut pas déconner, et puis c’est parti pour l’amusement !
Avant de débuter, un petit rappel des bases(ball, hi hi qu’est-ce qu’on se marre) du jeu. Le lanceur lance sa balle en destination du receveur équipé de son gros gant moche, tandis que le batteur, lorsqu’il est interprété par la console, saisit sa grosse batte et vous la FOURRE BIEN PROFOND DANS LE CUL.
Non sérieusement c’est quoi le problème avec ce jeu ? Que l’on s’amuse à essayer de faire des lancers mous, des rapides, des courbes ou même essayer de faire #cœuraveclesdoigts sur sa manette, l’IA de la console vous la mettra bien droit dans le fondement et alignera les home runs avec une régularité à en faire pâlir un contrôleur SNCF nostalgique de Reinhard Heydrich. Désolé pour le mauvais trait d’humour noir, mais il faut bien comprendre qu’une fois le train de la défaite est lancé, il ne s’arrêtera pas (ah, on me fait signe que je m’enfonce là)
J’ai bien tenté de persévérer un peu, d’apprendre les différentes combinaisons absolument pas instinctives, du genre pour faire courir le mec qui est en première base vers la deuxième, il faut faire droite+B, tout en prenant soin de répéter l’opération pour chaque base en changeant la direction, soit plein de manipulations relous alors que la console fait tout en simultané bordel ! Et si la console dispose d’une acuité absolument foudroyante pour bien niquer tous mes efforts, que dire de la nullité crasse qu’elle affiche pour permettre aux receveurs d’aller récupérer une pauvre balle envoyée pourtant pas si loin ? Ah ça, on n’a pas la main dessus, il va falloir s’habituer au triste spectacle des péons neuneus se rentrer dedans alors que la baballe est à leur pied, voire à partir en zigzag plutôt que de tracer tout droit.
Ou alors on m’a donné une équipe handisport sans me prévenir.
Un avis éclairé sur le net me fait comprendre que oui, au bout de nombreux efforts, on finira par vaincre la console, un soir de lune mal éclairée, tout en récitant des psaumes satanistes avec un os de biche bien calé au fond de la semelle gauche. En attendant, même les plus avancées des technologies de l’émulation comme le retour rapide ne me permettent pas de m'affranchir de la malédiction : quand la console a décidé qu’elle t’enculerait sur la prochaine balle, elle le fera. Et vu la durée d’une partie, des occasions de t’enculer, elle n’en aura pas qu’une.
Cette difficulté à peine forcée est inhérente de l’époque où est sorti le jeu, il fallait offrir une opposition relevée au joueur pour qu’il en ait pour son argent. Reconnaissons aussi que pour un jeu de simulation sportive de 1983, il offrait un panel d’action aussi large que le système et sa manette permettaient. C’est ce que retiennent d’ailleurs les amateurs : remis dans le contexte, il avait de solides arguments à faire valoir.
Mais quarante ans après sa sortie (oui, moi aussi ça me fait mal), qu’est-ce qui sauve ce jeu ? Personnellement, lorsque j'ai maille à partir avec cette fichue IA, c’est d’accepter mon triste sort et de laisser vagabonder mon esprit au-delà des sprites, me laisser transporter sur le terrain au côté de ces étranges coéquipiers, un peu maître à jouer sorti de nulle part prêt à retourner la console
sur fond de musique typique des années 80.
Elle était là, tendue dès l'allumage,
Mûe par le câble chaud.
Le vent, le vent brouillait l'image,
Sans trop de soubresauts…
J'arrivais avec ma portable, beau minet et roubignoles,
Gomina, Game Boy, skill impeccable,
De quoi la rendre folle…
L’ombre de Nintendo caressait ma peau, je menais déjà trois à zéro !
Et voilà Mario à la batte ! Vas-y Mario, fais-lui ton numéro ! Pas chaloupé, tango !
Parle-lui des chiottes de ta villa,
A Koopa Cabana…
Mais toutes les plus belles histoires s'arrêtent, et je me réveillais…
J'avais fait un rêve et dans ma tête, ce refrain résonnait :
L’ombre de Nintendo caressait ma peau, je prenais quarante à zéro.
L’ombre de Nintendoooooo caressait ma peau, je prenais quarante à zéroooooooooo.