Je m’en souviens comme si c’était hier. C’était un 9 Février. Vers 16h. Il faisait assez chaud malgré la date. J’étais seul devant mon ordinateur, un pad dans les mains. Devant moi, c’était la fin du jeu. Ce fut un grand moment de vide dans ma tête, un néant infini. Puis comme un tourbillon d’émotions, un big bang. J’avais envie de pleurer, mais je ne pleurais pas. J’avais envie de hurler de joie, mais je ne hurlais pas. C’est ce genre de moment qui laisse comme une forte trace dans notre esprit, un souvenir profond.
Je commence par la fin de l’aventure, mais comment tout cela a commencé d’abord ? Et bien allons-y. EarthBound, vous connaissez plus ou moins. J’ai découvert, comme pas mal d’européens, ce jeu par hasard sur Super Smash Bros Melee. Oui, vous savez Ness, le petit bonhomme avec une casquette et une batte de base-ball ? Bah c’est le jeu d’où il est tiré, tout bonnement. Énorme succès au Japon (d’où la présence de Ness), succès assez moyen aux US, et ce jeu n’est tout simplement pas arrivé sur nos lointaines contrées. D’où difficulté pour le dégoter. Et à mon âge, on pensait émulation avant de penser Ebay. Donc je me procurai la ROM d’Earthbound sur SNES. Évidemment, à ce moment là, je ne savais pas exactement à quoi j’allais jouer.
Logo. Encore Logo. Encore. Musique style parasite radio, et image style parasite télé. Diantre, fichtre et sapristi, mon jeu ne marche pas. Voila, j’ai mis assez de temps avant de me rendre compte que c’était pas un bug, mais bel et bien le début du jeu. « La patience est la clé vers tous les chemins » disait le moine chinois. Quel naïf je fus, alala. Ca ne fait rien, reprenons.
Bon, il se passe quoi après hein ? Bah on a une belle image très post-apocalyptique avec des OVNIS qui dévastent une ville avec un gros titre : « THE WAR AGAINST GIYGAS ». On frémit d’avance. Pour rien, car ce qui suit est beaucoup plus gentillet. Et on va longtemps se demander le pourquoi de cet intro. En fait on la revoit un peu à la fin, mais bon.
Bon écran titre, musique épique, on choisit un fichier. Et là, on choisit les noms. Pas un, LES noms. Avec au fond une musique entraînante. On vous montre 4 bonshommes susceptibles d’être les héros du jeu, on leur trouve un nom. De préférence pas idiots. Pour ce test, j’utiliserais les noms par défauts, à savoir Ness, Paula, Jeff, et Poo. On démarrera juste avec Ness, les autres viennent après. Chose un peu plus inhabituelle dans un RPG (Car il s’agit d’un RPG), on nous demande aussi ton plat cuisiné favori, et ta chose favorite (Je sens venir les amateurs d’humour fin). Une fois les formalités, c’est parti ! Donc voix digitalisée : « WAOH ! »
Intro. La vraie cette fois. Et profitez-en car les cinématiques dans ce jeu se comptent sur les doigts d’un manchot. On situe l’histoire. Ça se passe en 199X (Ouééééé), à Onett, petite ville située dans Eagleland, dans la maison de Ness. C’est la nuit, Ness dort. Jusque là tout va bien. Un grand bruit mêlé à une forte secousse le réveille. Aïe. Que s’est-il passé ? A vous de le savoir ! Ness sort de sa maison et part à l’aventure…
…Ou presque. Car sa mère, après avoir lancé sa réplique cinglante, vous dit d’aller d’abord vous habillez. Ben oui, un héros en pyjama, ca le fait pas trop. Bon, vous voila avec votre sac, votre casquette et votre batte de base-ball, en avant pour l’aventure !
Bon, dehors, des flics exténués de partout. On vous parle d’une météorite qui s’est est écrasée. Arrivé en haut de la colline, on vous bloque l’accès à la météorite. Sur place, il y a votre voisin Pokey, qui dit qu’il te dira tout le lendemain sur l’affaire de la météorite. Soit. Vous repartez vous coucher. (Tu parles d’un héros !) Mais plus tard dans la nuit Pokey frappe à votre porte, et vous explique que les Sharks, les racailles locales, se sont mêlés à cet affaire et que dans les négociations, Pokey a perdu son frère Picky. Bon, c’est reparti pour un tour.
Arrivé à la météorite, vous retrouvez Picky, qui explique que c’est plutôt Pokey qui s’est enfuit comme un trouillard. Tiens donc. Vous repartez, quand soudain un drôle de bruit surgit, celui d’une abeille qui vole. Un raie de lumière sort de la météorite et soudain apparait…Une abeille. Qui parle. Qui vient du futur. Elle vous explique que dans le futur, tout est dévastation. Un extraterrestre nommé Giygas domine le monde dans la peur et la souffrance. Mais qu’une prophétie ancienne dit que 3 garçons et une fille sauverons le monde de son funeste destin. Tu es le premier garçon, bien sûr. Mais pour avoir assez de puissance, tu dois t’unir avec les pouvoirs de la Terre, et pour cela aller à 8 endroits différents du globe et récolter dans chaque endroit une mélodie. C’est parti mon kiki.
J’entends déjà les kévins dire : « Ouaip super, le RPG bien classique avec les combats à la Pokémon ». Eux peuvent partir. Si vous n’êtes pas tombés sous le charme de cet intro loufoque, je ne peux rien pour vous. Certes, le scénario peut paraître classique. Mais j’y reviendrais plus tard. Les combats sont peut être à la Pokémon. Ok. D’ailleurs Pokémon a repompé sur EB, mais ça c’est une autre histoire. Bon, nous sommes dans un RPG, alors parlons des combats.
Les combats au début ne sont pas passionnants. On pourra néanmoins saluer l’absence de combats aléatoires, les ennemis se voient sur la carte, et peuvent être esquivés. Joie.
Ensuite, les premiers combats sont mous. Attaquer, attaquer, attaquer. Mention spéciale en revanche aux musiques et aux arrières plans psychédéliques. Mais notre petit Ness n’a pas que sa batte de base-ball, en gagnant des niveaux, il peut gagner des pouvoirs PSI ! Et ses pouvoirs, bien utilisés, rajoute une bonne pointe de stratégie au combat.
Les combats ont aussi un gros facteur stress : les HP qui défilent. En gros, vous pouvez prendre une attaque mortelle, vous verrez vos HP défiler jusqu’au zéro fatidique. Mais pendant qu’ils défilent, vous pouvez agir ! Soit en mangeant un peu de nourriture ou en faisant un PSI Lifeup, ou encore en donnant le coup final à votre adversaire, et ainsi survivre. Nombreux seront les combats qui se remporteront sur le fil du rasoir, en frôlant le Game Over de près.
Quand au leveling, il est présent surtout au début du jeu, mais dés que les autres personnages vous rejoignent, ca glisse comme sur du beurre.
On regrettera aussi un inventaire trop bordélique, qui s'il est bien utilisé se révèle un allié de taille. Mais les joueurs qui ont des couilles comme moi auront tendance à se fier surtout aux pouvoirs PSI.
Mais Earthbound, ce n’est pas seulement des combats, c’est avant tout un univers. Et contrairement aux RPG ou Zelda moyen, l’univers ne s’explore pas de la manière « Overworld-village-donjon ». Bien au contraire, ça part dans tous les sens. On commencera à explorer gentiment les villes, puis au passage on ira dans la Saturn Valley, puis on va passer dans un désert, puis dans un village enneigé, etc etc.
Les 8 mélodies s’attrapent quasiment en parallèle de l’histoire, il n’est pas tout le temps nécessaire d’en récupérer une pour faire avancer le jeu. Ainsi on sera amené à en louper pas mal.
Pour introduire un nouveau personnage, on ira même jusqu'à l’incarner à part et partir avec lui d’un endroit totalement différent. Tout bonnement génial.
L’univers est assez exceptionnel. Comme vous pouvez vous en douter, ca n’a rien à voir avec les RPG médiévaux classiques. Certains endroits sont assez surprenants, voir énormément surprenants. A vrai dire on se demande parfois si le jeu n’a pas été développé sous ecstazy (NDLR : Euh non j'étais à Bangkok au moment du développement) tellement certains passages sont délirants. L’univers n’est pas qu’urbain, on ira dans les déserts et les montagnes aussi.
On notera également le bon humour du jeu, les dialogues de PNJ excellents, ainsi que des répliques cultes. On appréciera aussi les nombreuses références 70s cachées dans le jeu, principalement aux Beatles.
Parlons également des musiques, avec des genres divers et variés, elles donneront le ton tout au long du jeu. Elles sont sublimes, voila tout. Elles font parti des meilleures musiques de jeux vidéo à mon goût.
Mais qu'en est-il du scénario ? Est-il développé au fur et à mesure du jeu ? Oh que oui. C’est bien simple, un rebondissement par partie. L’intrigue se révèle gentiment au début, on navigue de ville en ville, on s’amuse. Puis l’objectif final se dévoile peu à peu, on commence à bien s’y diriger. A partir de la 2éme moitié pour être précis. A ce moment là, j’ai commencé à avoir un peu peur. En effet, on n’a aucune idée de ce qui nous attend.
Puis ça arrive. On part combattre Giygas.
Bon, arrêtons-nous un instant. Dans beaucoup de jeux, vous devez sauver le monde, bien vrai ? Le héros, sa destinée, botter le cul du méchant, tout ca. Au final, pour vous, gamer compétent que vous êtes, vous avez sauvé le monde plusieurs fois. Bien. Avez-vous vraiment eu déjà l’impression d’avoir sauvé le monde ? Non. Bien évidemment, car comme toujours, le héros est plus puissant que le méchant et le bien l’emporte toujours à la fin. C’est évident. Pourtant, dans EarthBound, j’ai réellement douté de moi. Arrivé au lieu final, j’étais terrorisé, j’entendais mon cœur battre. J’avais devant moi le mal incarné, j’avais peur. Vers la fin, tout est fait pour vous déstabiliser, et c’est diablement réussi. Tout le reste du jeu n’était qu’une préparation à cette finalité, maintenant que vous êtes entré dans le jeu, vous ne pouvez plus en ressortir. Et c’est pour ca que vous avez peur. Vous sentez le poids du monde sur vos épaules.
Bien sûr, je ne le nierais pas, vous réussissez. Mais à la fin, c’est comme si vous venez de sauver réellement le monde. Vous savez maintenant ce que cela représente.
Si un jour vous croisez quelqu’un qui a fini EarthBound, sachez que c’est un héros, il a sauvé le monde.