Le site qui sert à la cuillère au cinquième set.
Snatcher (CD)
Konami - 1994
Let's go, Metal ! par Pixxell

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Tout le monde a des idoles. Pour prouver cela, nul besoin d’avoir des posters dédicacés provenant du magazine Actu Star couvrant les murs de sa maison (même extérieurs), de posséder toutes les éditions de son maxi ultra rare ou d’avoir une peluche à son effigie trôner sur son lit. Pour moi, il suffit juste de parler avec émotion de ce que cette personne a fait, le sourire aux lèvres et, en option, les yeux pleins d’étoiles avec des larmes qui coulent le long des joues.



C’est ce qui m’arrive quand on fait allusion à Hideo Kojima, créateur des sagas Metal Gear ou encore Zone Of The Enders (je précise pour le petit Ghost, là-bas, au fond). Je vous vois venir avec vos gros sabots. Oui oui, je parle bien de ce petit japonais qui ose afficher son nom, en gros et en lettres simili-dorées, sur les pochettes ou les génériques de ses jeux. Il a du culot ce gars, prétentieux comme tout, vous ne trouvez pas ? Je répondrai bien par la négative.



Pourquoi ? Parce que c’est à coup sûr un gage d’une certaine qualité. Ah, mais je dois critiquer un de ses jeux. Je tenterai bien de rester totalement objective, mais sachez que c’est la découverte de ce jeu qui a fait le respect que je porte à cet étrange homme qui a à la main une bière sur toutes les photos Google Images. N’étant pas du genre bon public, c’est bien qu’il doit y avoir quelque chose...



Tout d’abord, un peu d’histoire. Snatcher est en réalité le second jeu de son créateur. Sorti tout d’abord en 88 sur ce bon vieux MSX2, il sera adapté sur plusieurs supports, tels que le PC Engine ou le Mega-CD. On aura aussi pu apercevoir une sorte de remake de ce jeu, en 1990, sous les traits du jeu ‘SD Snatcher’, reprenant la trame générale du jeu original en lui ajoutant des graphismes Super Deformed beaucoup trop mignons (attention à la scène avec JJ, toutefois, ça peut en refroidir plus d’un) et en remplaçant le système de jeu pour en faire un RPG. Ici, je vous parle de la seule version sortie en anglais, et donc la plus accessible pour nous, idiots d’occidentaux.



Tout est beau dans le monde. Les gens sont magnifiques, les oiseaux chantent, les prés sont verts et tous les habitants de la Terre possèdent une Megadrive en triple exemplaire à la maison. Mais, vous vous en doutez, tout cela ne va pas durer. Le 6 juin 1996 (1991 dans la version originelle), tout bascule. Alors que des gens de bon goût écoutent le dernier album de PJ Harvey, une terrible explosion se produit dans le laboratoire gouvernemental secret de méchants soviets. Se répand alors sur le monde entier le Lucifer Alpha, bactérie extrêmement volatile et pas sympa du tout. En quelques mois, c’est plus de la moitié de la population terrienne qui est décimée.



Et puis, cinquante ans plus tard, alors que le monde se reconstruit doucement, le sort se remet à s’acharner sur les terriens restants. En effet, c’est à ce moment là que sont découverts, dans un avion écrasé en montagne, les restes d’une victime des plus étranges. Une sorte d’androïde déguisé en humain, à la manière d’un T-800. Plus tard, on pourra se rendre compte que ce que l’on a décidé de nommer « Snatcher » n’est pas le seul spécimen sur Terre. En effet, ils se développent, de plus en plus nombreux. Tuant des gens pour s’approprier leur corps et s’infiltrer chez les humains, ils sont une véritable menace.



L’action prend place à Neo-Kobe, ville à l’ambiance cyberpunk palpable. Nous sommes maintenant en 2047, et le nombre de Snatchers ne va pas en faiblissant. Pire, la majorité d’entre eux est basée à Neo-Kobe. Quel manque de pot. C’est en partant de ce constat qu’y a été créé le groupement anti-snatcher J.U.N.K.E.R. (Judgement Uninfected Naked Kind & Execute Rangers).



C’est dans cet environnement que vous incarnez Gillian Seed, beau gosse de son état. Lui et son ex-femme, Jamie, souffrent d’une amnésie grave depuis qu’ils se sont « réveillés », il y a quelques années déjà... Ils ne se rappellent même pas de la vie qu'ils auraient eue ensemble. Pourtant, une chose réussit à faire émerger quelques souvenirs chez Gillian : le mot "Snatcher"… Il décide donc de les combattre afin de, peut-être, retrouver la mémoire. Seul moyen potable : devenir un "Runner", c’est à dire un membre de l’équipe J.U.N.K.E.R. Ainsi, la thérapie de Gillian commence, avec vous, joueur, comme guide : Retrouvera-t-il la mémoire ? Que veulent vraiment les Snatchers ? Comment et où vivent-ils ? Qui les a créés et pourquoi ? Quel est le véritable secret de l'Île aux Singes ? Tant de questions qui auront leur réponse. Ou pas.



L’inspiration de ce jeu, vous l’aurez sûrement remarqué, est nettement basée sur le cinéma de science-fiction. Les références les plus flagrantes sont bien évidemment Blade Runner et Terminator, ainsi que, dans une moindre mesure, The Body Snatcher, les anti-allergisants ou les pubs Nivea pour des protecteurs de peau UVA/UVB indice 40. Non, non, je ne m’égare pas...



Le jeu en lui-même est sous la forme de ce que l'on appelle chez les Nippons un digital comic. En gros, il s’agit d’un jeu d’aventure et d’investigation se déroulant via une succession d’écrans fixes ou de petites cinématiques, et l’on passe de lieu en lieu en interrogeant les gens, en inspectant les environs ou en réalisant certaines actions.



Niveau gameplay général, Snatcher peut donc être comparé à un bon vieux jeu d’aventure, où l’on n’utiliserait que des commandes apparaissant au fur et à mesure des découvertes. Aidé de votre navigateur, le Little Metal, ressemblant à s’y méprendre à un certain Metal Gear TX-55 miniature, on observe une scène, puis on utilise des commandes telles qu’ "Inspecter" ou "Demander". Le choix s'étoffe ensuite par rapport à l'action effectuée. Par exemple, si vous choisissez la commande "Demander", vous aurez le choix par rapport aux personnes se trouvant dans les environs et les découvertes déjà faites. Pas super révolutionnaire sur ce point là, il est vrai. Mais ce jeu réserve beaucoup de surprises scénaristiques comme en reserve très souvent Kojima. C’est bien simple, il n’y a quasiment aucun temps mort et, lorsqu’il y en a, l’ambiance légèrement malsaine de Neo-Kobe nous rattrape. Le schéma se rapproche presque d’un action = rebondissement. Pas moyen de s’ennuyer, donc, ce qui est un bon point pour Snatcher, en comparaison d’autres digital comic qui peuvent vous endormir après quelques minutes de jeu.



L'histoire est adulte, avec des rebondissements à foison (et une scène finale grandiose), du sang, des boyaux, et presque du nu. Mais aussi pleine d’humour, grâce notamment aux références que le créateur du jeu se complait à disséminer tout au long de notre périple. Il est toujours amusant de se rendre dans le magasin "Plato’s Cavern" (nommé "Joy Division" dans l’épisode originel) à l’enseigne imitant les fameuses vagues du logo Konami. D’aller boire un verre dans le bar Outer Heaven entre un membre de la famille Belmont, un mercenaire de Contra et un sosie de Goemon. De découvrir que le monde parallèle dans lequel vit Gillian Seed est en fait le même que celui de Solid Snake...



D’ailleurs, on peut noter que chaque endroit dans le jeu a son atmosphère et est rempli de détails. Le moment le plus saisissant est peut être celui de la visite de l’hôpital, où le climat est des plus oppressants. Le joueur peut aussi interagir avec bon nombre d'habitants de Neo-Kobe et réaliser des actions aussi anodines que décider de manger, de quoi vous immerger un peu plus.



Toutefois, afin de casser le rythme ‘textuel’ du soft, il est aussi possible de mettre à contribution ses réflexes, lors de quelques phases de tirs en vue subjective à la manette. Lors d’un fondu accompagné d’un suspense à faire pâlir Hitchcock, l'écran se divise en neuf parties. Il suffit alors de placer le curseur qui apparaît dans l'une des cases et de tirer... Certes, on a vu plus compliqué mais... Lors de la dernière ligne droite, à quelques écrans de la fin du jeu, vous maudirez sûrement votre vitesse de réaction digne d’une grand-mère parkinsonienne.



L’utilisation de la technique du digital comic permet ainsi de faire de Snatcher une sorte de bande dessinée cyberpunk interactive. Les persos secondaires sont nombreux, variés, très charismatiques et ont une véritable existence. Entre un froid mais dragueur Gillian, une Mika potiche gentille, un Benson Cunningham limite tyrannique, un énigmatique Radom Hajile ou un Napoléon fan de déguisements, vous allez être servis.



Tout ceci est servit par une excellente réalisation. Les graphismes tendent à rapprocher Snatcher d’un anime, et l’environnement sonore n’est pas en reste. Toutes les voix ont été traduites du japonais et digitalisées. Quant aux doubleurs, ils sont excellents. Encore un point positif pour immerger le joueur dans Neo-Kobe. Toutefois, lors de quelques passages non sous-titrés, les qualités d’anglophone du joueur que vous êtes risquent d’être mises à rude épreuve. Car essayer de comprendre, juste à l’oreille, ce dont parlent les protagonistes, n’est alors plus vraiment une partie de plaisir, surtout quand un petit grésillement accompagne la voix.



Au niveau des défauts ? Et bien, dans mon amour immodéré pour ce jeu à l’ambiance remarquable, j’en ai trouvé un. Qui se révèle être de taille, d’ailleurs, mais malheureusement récurrent dans le genre de l‘aventure vidéoludique. Le problème majeur du jeu est qu’il se trouve être d’une linéarité déconcertante. On ne peut pas rester bloqué, seules les quelques petites énigmes et le manque de dextérité lors des phases de shoot pourraient vous ralentir.



En réalité, c’est aussi simple que ça : il suffit de réaliser toutes les actions possibles pour avancer un peu plus. De ce fait, même sans comprendre un traître mot d’anglais - voire de nippon pour les plus téméraires/fous/idiots [rayez la mention inutile] -, on peut finir ce jeu. Ce qui est, vous en conviendrez, bien dommage pour un soft où le scénario est la base du plaisir (on oubliera Katrina sortant de la douche, messieurs...). De plus, cette linéarité engendre un replay value très bas. Mais quand on aime un film ou un livre, peut-on vraiment s’empêcher d’y replonger avec délice ?
Le point de vue de César Ramos :
Un jeu Mega CD, par définition est une chose rare... Et vraisemblablement chère...