La vie est une vieille pute, tout le monde sait ça. Mais aussi vieille et aussi pute soit elle, elle nous réserve parfois, au détour d’évènements plus ou moins désagréables, des rencontres d’une telle intensité qu’on en ressort changé, embelli oserais-je même dire. KNTNKWN (vous ne pensiez pas que j’allais passer le reste du test à écrire le titre en entier tout de même, naïfs enfants que vous êtes) est un jeu hautement emblématique de cette forme de surprise ludique dont seuls nos amis nippons ont le secret.
Beauté des décors, magie des dialogues
Amis dansons nus sous les étoiles de l’insouciance et buvons à notre éternelle jeunesse d’esprit ! Célébrons comme il se doit une pépite, un joyau, un chef d’œuvre monochrome comme seul le Gameboy sait nous en offrir.
Puisqu'on vous dit que c'est beau
Car ne nous y trompons pas, c’est bien un jeu monumental que nous avons entre les mains. Et qu’il nous aura fallu attendre près de 20 ans puisque sa localisation exclusivement réservée à l’archipel désormais radioactif l’a de fait condamné à l’oubli de notre côté du monde. Ce mal est réparé grâce à une équipe de bienfaiteurs de l’humanité ayant décidé de lâcher dans la nature une traduction anglaise de qualité professionnelle un beau jour de juillet 2011, le soft originel datant tout de même de 1992. Alors n’y voyez pas une incitation à l’utilisation des roms, ceux-ci étant déjà largement exploités par les sociétés de nettoyage de pare-brises, mais objectivement si vous passez à côté de ce jeu, vous vous en boufferez les couilles des années durant. C’est dit.
Au départ j'ai juste accepté de goûter une potion...
Renommé For The Frog The Bell Tolls pour être un peu mieux retenu par le commun des mortels peu habitués aux sonorités asiatiques, KNTNKWN, que nous appellerons désormais Kaeru, parce que bon, ça va deux minutes, est un jeu d’aventure/action que j’ai classé là faute de lui trouver une catégorie plus appropriée. Toutefois ne vous y trompez pas, ce n’est pas parce que le genre est flou que le plaisir est tronqué, loin de là. Et même si le jeu se torche en 5 à 6 heures montre en main, ce n’est pas un souci.
De l'intensité du jeu d'acteur pixelisé
Oh je vois bien à vos mines renfrognées que vous êtes un peu déçus par cette durée famélique. Sauf que là on parle de fellation les gars. Une bonne grosse fellation de professionnelle pendant 6 heures de rang. Ah ! Ça sourit déjà plus, hein ! Ce jeu va tellement vous bouffer la queue que vous le supplierez de vous finir plus d’une fois avant la fin à tel point c’est bon, parole. Et si vous êtes une fille ça marche aussi, évidemment, mais pas avec les mêmes mots, forcément.
Je ne me rappelle effectivement pas de tout mais je veux bien que vous m'y aidiez Madame
Rarement un titre aura caressé les couilles d’un joueur avec autant de délicatesse, le tout sans faire une once de fan service qui plus est ! Bon, un petit peu quand même, mais plus sous forme de clin d’œil qu’autre chose. Si en plus je rajoute que c’est le moteur de Kaeru qui a servi pour réaliser Link’s Awakening cela m’étonnerait qu’il y en ait encore beaucoup à rester étanches parmi vous.
Variété des situations, plaisir de déambuler
Rien que le pitch de départ va vous vendre du rêve, vous allez voir. Vous incarnez le prince Sablé. Oui, comme la pâtisserie des années 80 (allez encore trouver un sablé en boulangerie aujourd’hui… la pouffiasse affectée au département vente et productivité, la caissière comme disent les pauvres gens, ne sait même plus ce que c’est… triste monde, tiens), ce qui tombe plutôt bien pour les nostalgiques que nous sommes. Le prince Sablé est l’éternel rival du prince Richard. Là comme ça, à brûle pourpoint, ça ne vous dit rien. Et pourtant vous connaissez tous Richard : il s’agit du Richard présent dans Link’s Awakening au milieu de ses grenouilles, référence que vous comprendrez aisément une fois que vous aurez goûté à Kaeru. Non, Yoshi, Chomp, et autres Mr Write ne sont pas les seuls caméos présents sur Cocolint, Richard fait également partie des VIP invités pour son lien avec le moteur du jeu. Je sais, c’est encore plus fou : ce n’est donc pas Kaeru qui ressemble à Zelda mais bien l’inverse. C’est beau, c’est grand, mais… je… qu’est ce qui nous arrive ? Tais-toi, ne brise pas la magie de cet instant, chaton.
Un inventaire bien fourni est la garantie d'une aventure sans souci
Bref Richard et Sablé se tirent la bourre. Évidemment ils le font pour une princesse (si fou soit le jeu on est quand même au japon en 1992, il y a des choses avec lesquelles on ne plaisante pas) qui répond au doux nom de Tiramisu, laquelle règne sur le royaume de Mille-Feuilles…dont le palais s’appelle Éclair… un truc pareil ne s’invente pas à moins d’être fou, ou alors très con, peut être même les deux. Quoi qu’il en soit vous voici au bord de l’indigestion dans la peau de Sablé, que vous pourrez renommer comme bon vous semble histoire de voir des « Prince Pédélehérosdugouter » s’afficher tout au long de l’aventure, il faut bien s’amuser un peu à nos âges, qui va se retrouver embarqué dans de rocambolesques péripéties.
Une grenouille badass, un donjon velu : quelle atmosphère oppressante!
Oui, figurez vous que la grognasse en chef a vu son royaume envahi par une mystérieuse armée, alors qu’elle est réputée pour avoir des pouvoirs magiques de malade mais bref passons, et qu’elle n’a rien trouvé de mieux que de se faire capturer. Ni une ni deux, votre sang ne fait qu’un tour ! Il faut sauver Tiramisu ! Impossible de tolérer pareil traitement envers une femme !! Surtout depuis que Richard vous a collé son pied au cul pour vous faire descendre du bateau en expliquant que finalement il s’en sortirait très bien tout seul. En clair si vous souhaitez finir votre vie autrement que sur la béquille il va falloir vous sortir les doigts, et vite. Le père Richard est chaud patate et bien décidé à pécho l’abricot de la pâtissière. Bon, vous pensez bien que je romance un peu le propos, mais c’est pour mieux vous fixer l’idée générale de la chose.
Batman en guest star : checked
C’est à ce moment précis que le jeu vous file les commandes. Enfin façon de parler. Dire que Kaeru est un jeu compliqué serait un mensonge. Je l’ai déjà dit, Kaeru est une gâterie et à ce titre il ne vous demandera aucun effort. Le jeu est scripté à mort et vous guidera sans effort vers la seule fin possible, le principe étant généralement d’aller chercher quelque chose pour quelqu’un afin de déclencher une autre quête du même genre. L’étroitesse de la carte à explorer ainsi que la subtilité toute relative des indices que vous donneront les villageois, du style « si j’étais toi j’irai boire un coup au puits dans le désert », en font un jeu d’aventure qu’on pourrait qualifier de chiant.
A Link to the Past : projet
D’autant plus que les phases actions sont elles aussi semi-scriptées puisque les combats sont passifs : il vous suffit de toucher un ennemi pour engager un combat dont la résolution se fait automatiquement en fonction des puissances comparées du monstre et de Sablé. Combiné au scriptage à outrance du scénario, cela a pour conséquence de vous interdire la victoire sur certains boss tant que vous n’aurez pas récupéré tous les power-ups d’une zone. Oui je sais, ça aussi ça a l’air pénible. Et pourtant il n’en est rien.
La minute gastronomie du jeu
Tout d’abord parce que le jeu est beau, très beau. Les zones sont variées et les ennemis particulièrement bien foutus tant ils sont originaux. Le dynamisme imprimé par le script permet en outre de ne pas passer de longues heures sur chaque coin du royaume et évite ainsi toute lassitude. Preuve de la volonté des développeurs de caresser le joueur dans le sens du poil, la plupart du temps quand vous arriverez au bout d’une zone le jeu reprendra les commandes pour vous emmener directement à la prochaine via le déroulement de l’histoire. Mine de rien c’est magique, ça transpire l’amour du jeu agréable par tous les pixels.
Même après les sports d'hiver, ne jamais négliger l'essentiel
Ensuite parce que le jeu est rempli d’un humour délirant assez inhabituel pour un jeu GB. Les clins d’œil sont légion et plus d’une fois vous sourirez niaisement devant tous ces cadeaux réservés aux joueurs avertis. Citons la présence de Sonic en guise d’ennemi, la firme du scientifique fou du jeu qui s’appelle Nantendo (et dont l’invention principale est juste magique), un vautour nommé Polnareff, j’en passe et des meilleurs. A ce moment là on se dit que les ptits gars derrière ce truc ont vraiment eu à cœur d’offrir plus qu’un jeu au public du Gameboy. Ou plutôt moins, tant il est plus question d’aventure interactive que de jeu à proprement parler. Un cadeau, un vrai cadeau qui fait plaisir sans exigence d’aucune sorte en contre partie, un peu comme une fellation donc. Rien d’étonnant quand on s’aperçoit qu’il s’agit en fait du R&D de Nintendo aidé d’Intelligent Systems, les mecs qui ont pondu les série des Fire Emblem, des Famicom Wars (Advanced Wars) et qui plus tard bosseront sur les Warioware, les Paper Mario et autres Mario Kart Super Circuit. Oui, c’était déjà bon, mais si en plus c’est fait par quelqu’un de connu, c’est encore meilleur.
Une grosse épée c'est toujours la garantie de chopper à moindre frais
Si c’est la fête côté ennemis et personnages, les situations qu’ils vivront ne sont pas en reste non plus. Coups de théâtre absurdes, second degré à outrance, pas un instant vous n’aurez l’impression que le soft se prend au sérieux, pour votre plus grande joie. Jamais le mécanisme de quêtes emboîtées dans d’autres quêtes, yo dawg, n’aura été si amusant.
Un mammouth, un contrôleur cérébral, un problème de moins
Et si je termine en vous disant que la musique est de Kazumi Totaka, le fameux K.K. d’animal crossing, l’auteur de la légendaire K.K. Song, ça vous parle ? Du miel pour les oreilles. Rythmée, entraînante, appropriée à l’action, elle est simplement parfaite. Et si vous vous demandez si la KK song est présente, je vous répondrai simplement : à votre avis ?
Perspicace!
J’en ai terminé. Je ne pense pas avoir oublié quoi que ce soit, en tout cas rien qui pourrait vous faire plus envie de vous jeter sur la rom dès que possible. Au prochain feu rouge, donc. Il faudrait inventer d’autres superlatifs pour des titres de ce genre, tant Kaeru est à part. Pas de challenge, mais pas vraiment passif non plus, il est finalement à l’image de sa jaquette japonaise : merveilleux.
Il me reste à adresser tous mes remerciements à Zimgief pour nous avoir fait découvrir ce nectar venu d’ailleurs et ainsi me donner la possibilité de partager ce plaisir avec vous.
Définitivement trop court, mais tellement bon...