Le Game Boy était une console de pauvres. Deux fois moins chère que ses concurrentes, aussi bien à l'achat qu'à l'entretien, le pavé de notre enfance (ou du moins, de la mienne) permettait de s'enfiler peinard quelques mythes dans la poche, mythes pour lesquels il aurait fallu débourser une somme rondelette si on avait voulu y jouer sur Amiga ou Atari, voir CPC, puisqu'il aurait tout simplement fallu acheter ladite machine et que je n'avais pas la place dans ma chambre pour ça.
Mais chez Nintendo, on ne s'est pas fait des couilles en or avec un joyau communiste pour rien (Tetris, je précise pour les nuls.) La console va donc être l'alliée des bouseux dans mon genre et autres Roumains pour, par exemple, jouer sous la couette aux bombes de l'époque, comme - au hasard - Speedball 2.
Je sais, n'en dites pas plus : vous êtes de bons oldistes chatouilleux, et le passage au Noir et Blanc sur une console au processeur arthritique vous effraie légitimement. Speedball 2, l'ami Hebus vous en a parlé et vous a tout dit : Les Super Nashwan, les Bitmap Brothers, "ICE CREAAAM" et autres prothèses que le oldies de bon goût que vous êtes aura pris la peine de lire dans la section "Amiga" de ce site. Oui, le mythe vous est connu, ou du moins le devrait-il. Et si mythe il y a, il y a adaptation sur plein de plates-formes. Normal.
Sauf que le Game Boy est tout sauf un foudre de guerre, et pour un jeu qui est censé être une débauche de vitesse et de décharges d'adrénaline, c'est un peu ennuyeux. Et c'est là que le destin est bon avec ma pauvre carcasse : la version Game Boy fût la première à laquelle j'ai joué. Ha ha, je n'étais donc pas pourri d'avance par le luxe et l'opulence, joie !
Alors que retenir pour vous ? Tout simplement que le Game Boy est une console de pauvres, oui, mais surtout de solitaires. Ceux qui ont abusé du multijoueurs sont si peu nombreux qu'ils peuvent s'en vanter encore aujourd'hui. En conséquence, l'adaptation va se permettre le sacrilège de supprimer le mode 2 joueurs, ce qui déjà va permettre de gagner un peu. Et Speedball a cet avantage d'être jouissif à deux en étant très intéressant tout seul, alors profitons-en.
Mais ça ne suffit toujours pas. Il va falloir tailler dans le gras. Les sons, forcément : de toute façon on n'allait pas avoir le sacro-saint chiptune Amiga sur notre haut-parleur cathareux. Dites adieu à votre "Ice creaaam" favori, mais consolez-vous en vous disant que ça a un petit charme bip-bip-tuiit très chouette. Idem pour les graphismes : ça reste relativement clair et lisible. On voit le terrain, les joueurs, les options, que demander de plus ? On notera même que certains écrans ont été honteusement écrasés à la hussarde pour tenir dans l'écran carré du Game Boy. Ce qui fait qu'en jouant sur un Game Boy SP, vous pourrez avoir presque les proportions originales si vous utilisez la fonction "plein écran", c'est rigolo.
Donc on tasse tout ça, ça fait un peu "je passe d'une valise de 35 litres pleine à une valise de 15 en m'asseyant dessus avec mes trois potes pour réussir à la fermer." Et ça ferme, ou du moins, ça passe. Mais reste un écueil, la jouabilité. Nous ne saurions tolérer un Speedball mou du slip !
Et c'est là que tout se jouera pour vous. Je connais des joueurs qui ne supportent pas l'espèce de bordel de chiotte de lenteur de cette version. C'est sûr, ça claque moins, ça envoie moins le pâté comme on dit. Je dirais même que ça envoie au mieux de la mousse de foie premier prix. On se traîne la quenouille comme pas possible et on prédit la fonte du processeur à chaque passe longue. Mais curieusement ça tient, pas un pet de scintillement, ni même de ralentissement (en même temps, ça serait malheureux).
Pour ma part je m'y suis très bien fait. Bien sûr il faut que je passe mon cerveau en mode turbo dès que je rejoue sur Amiga ou Megadrive, mais plutôt que d'ergoter là-dessus, je voudrais saluer la performance. Quelque part du coup, par contraste, ça rend le jeu des autres versions super nerveux, en toute chose il faut voir le côté positif, comme on dit. Et si c'est lent, au moins ça réagit dans le bon tempo, pas comme sur la version GBA qui est plus rapide mais pourtant semble un peu aléatoire sur certains coups. Il faut en prendre son parti, quoi.
Donc ça reste jouable, potable, passable, honorable. Les règles n'ont pas changé, on prend toujours son pied à satonner l'attaquant d'en face à grand coup de balle en métal dans la tronche, on adule toujours Jenson et Seline, on tremble toujours devant les Super Nashwan, que ce soit en coupe, championnat, ou knockout. Et on insulte toujours copieusement le triple connard qui vous tacle alors que vous venez à peine de récupérer le ballon. L'enculé. Bref, un petit match sur les gogues, ou entre les gares d'Angers-St Laud et Le Mans, passe fort bien et offre son petit plaisir.
A vous donc d'estimer votre degré de tolérance. Mais ne dit-on pas que "qui est heureux se contente de peu" ? *** regarde sa pile de jeux et de consoles auxquels il ne touche jamais, et se tire une balle ***