Il fait un temps idéal en ce matin d’été. L’aurore irise les cieux d’une douce clarté orangée. L’embrasement céleste est imminent, et la journée promet d’être chaude. A tous les sens du terme. C’est en effet aujourd’hui que j’ai rendez-vous avec une star déchue : Sonic. Si la moitié des rumeurs qui circulent à son sujet sont fondées, et qu’il me les confirme, je suis bon pour le Pulitzer.
Cette rencontre sent le soufre. Cette personnalité sent le soufre. Sonic traîne une réputation d’une épaisseur à peine croyable. Comment un seul homme a-t-il pu devenir à la fois l'icône d’une des plus grosses firmes mondiales de l’industrie du jeu vidéo mais aussi du mouvement anti-monopolistique de cette même industrie, et ce malgré sa quête désespérée à l’accession de ce même monopole ? Quel paradoxe fascinant. Peut être est-ce finalement là, la raison de sa chute. Était-elle donc prévisible avant même le commencement ? Assurément non, puisque nombreux sont ceux qui sont tombés avec lui.
Tant de choses me trottaient dans la tête. Tant de choses évincées pourtant par un lancinant malaise intérieur : après un plombier désabusé, ironique et superstar malgré lui, et un autiste orphelin idole de toute une génération, qu’allais-je donc trouver dans cette superbe villa des hauteurs de San Francisco ? Une chose était certaine : après un tel parcours il ne pouvait pas s’agir d’un homme ordinaire. Et cette pensée me réconfortait.
Ai-je dit superbe villa ? Oui je l’ai dit. Tant pis pour moi et ma crédulité envers les déclarations des attachés de presse. Je me tiens devant la demeure du hérisson bleu. Enfin c’est ce que laisse présager la plaque qui jouxte la sonnette : « Gérald « sonic » Lairisson ». La villa est bien sûr imposante, mais elle tient plus d’une vieille bâtisse vermoulue à la Tim Burton plutôt que du palace californien standard, et pour ce qui est du jardin il n’a rien à envier aux terrains vagues de mon enfance provençale. L’interphone est en panne visiblement. Tant pis, j’entre. La poignée de la grille me reste dans la main tandis que je manque recevoir une partie du pilier en pierre sur le crâne suite à la défection subite du gond supérieur !
C’est alors qu’une voie me hèle :
-Grands Dieux ! Vous n’avez rien j’espère ! Ça fait au moins cent fois que je répète au maçon de venir sceller ce parpaing, mais le petit personnel, de nos jours…
Le personnage est petit mais musculeux et sec. Il arbore un large sourire accueillant surmonté d’une coupe que je qualifierais de brosse désordonnée. Oui, il est plausible de prendre cet homme pour un hérisson. Mais pourquoi bleu ? Je retiens cette question pour plus tard alors que l’individu s’approche.
-Pas de casse alors ?
-Non, non, je vous remercie.
-Dieu merci. J’eus été mortifié par une éventuelle blessure. Vraiment, il faudra que je songe à rappeler le maçon. Bien. Vous êtes le journaliste qui m’a contacté ?
-En effet oui, je suis là dans le cadre d’une grande analyse des héros des jeux vidéo tels qu’ils sont une fois le show terminé.
-Excellente idée. Ça me divertira un peu de me remémorer cette bonne période. Veuillez me suivre jusqu’au salon. Nous n’allons pas deviser dans l’allée tout de même ! Hi hi hi !
-Je vous suis.
Sonic me précède et enrobe notre cheminement d’un flot continu de propos passe partout d’un niveau linguistique remarquable. L’homme est cultivé mais cherche manifestement à garder mon attention vers lui. Il est vrai que les quelques bribes visuelles qui proviennent du jardin me laissent perplexe : on jurerait cet endroit à l’abandon. Les herbes folles ont gagné bien plus qu’une simple bataille, et la nature a définitivement repris ses droits. Vraiment étrange comme entretient…
-…et donc vous avez vu d’autres « héros »
-Mmmhhh, euh, pardon ?
-Qui avez-vous vu d’autre ?
-Ah, et bien Mario et Link.
-Ah. Quel pauvre garçon ce Link.
Le visage de Sonic vient de se fermer. J’aurais peut être dû me montrer plus discret et dissimuler ma rencontre avec Mario. Mais le mal est fait.
Nous arrivons enfin. La double porte d’entrée pousse un gémissement d’agonie sous la poussée de son propriétaire.
-Humpff. Ils ont encore oublié de l’huiler !
Le spectacle intérieur est saisissant. Si le ménage a un jour été fait en ces lieux, ce n’est plus maintenant qu’une légende que les mères araignées racontent à leurs petits pour les effrayer. Les quelques rares meubles qui ornent ces grandes pièces vides sont recouverts d’une couche abracadabrante de poussière. C’est sale du sol au plafond. Sonic remarque mon air dubitatif.
-Ah ah, et bien voyez-vous, les femmes de ménages ne sont pas passées cette semaine.
Il s’assoie dans un grand fauteuil de cuir. Quelques insectes quelconques s’en échappent sous l’effet du dérangement. Je me contente d’une chaise en paille, d’ailleurs la seule autre possibilité offerte de m’asseoir.
-Étant donné le tableau, je jugerais pour ma part qu’elle ne sont pas venue cette année plutôt, non ?
-… oh et puis à quoi bon ?
La mine joviale de Sonic se vaporise tristement et laisse place à un désagréable masque de douleur résignée.
-De toute façon je n’ai plus le courage de maintenir les illusions du passé. Mais le présent est tellement douloureux, tellement douloureux…
-Si vous me parliez un peu de votre vie, de votre carrière. Comment ont-elles commencées ?
-Je suis né à Paris en 1971. Mon vrai nom est Gérald Lairisson.
-C’est ce que j’ai lu sur la sonnette.
-Mon père était gérant d’une boutique Vuitton sur les Champs Elysées, et ma mère s’occupait de mes deux frères et de moi. Je n’ai rien de croustillant à vous révéler sur cette période vous savez. Elle fut heureuse et sans heurt d’aucune sorte. Le temps coulait paisiblement dans son lit.
-Mais quelle formation avez vous eu ?
-Aucune, fils à papa n’étant pas encore reconnu par les pouvoirs publics. Mon premier job c’est mon père qui me l’a offert dans sa boutique.
-Chez Vuitton ?
-Avec une éducation rigoureuse et un peu de bagou, vous pouvez vendre n’importe quoi à n'importe qui, surtout chez Vuitton.
-Alors comment avez-vous atterri chez Sega ?
-Un simple concours de circonstance. Cela faisait deux ans que je travaillais là bas, quand un énième car de Japonais est entré. Un voyage d’entreprise. Le cadeau du boss de chez Sega à ses employés les plus méritants.
-Et ?
-Vous connaissez l’amour des japonais pour Vuitton. Il est si délirant que nous avons des consignes pour ne pas leur vendre une quantité trop importante d’articles par personne.
-Je suis au courant en effet.
-Donc nous avons commencé à nous repartir les clients, et c’est là que j’ai rencontré Yuji Naka.
-Etonnant ! Mais il parlait français ?
-Un petit peu. Le minimum vital, quoi. Comme les achats sont nombreux, et donc durent un grand moment, nous nous sommes présentés l’un à l’autre. A cette époque quand je citais mon nom, j’ajoutais toujours « comme l’animal, mais aucun lien de parenté » pour détendre l’atmosphère. Cette rengaine sortait comme un tic. C’en était vraisemblablement un, d’ailleurs. Toujours est-il que devant cette phrase incongrue monsieur Naka est resté perplexe. Aussi a-t-il fallut que je me lance dans de longues explications appuyées de dessins du petit animal.
-Vous n’allez quand même pas me dire que c’est vous qui…
-Si. Je suis le lead designer de mon propre costume, ou plutôt j’étais. Je possédais peu de talents, mais le dessin faisait partie de ceux-là. monsieur Naka a été subjugué par mon croquis. Je ne sais pas pourquoi, mais il semblait surexcité et a rameuté le car au grand complet pour que tous puissent contempler mon œuvre. Et tous semblaient partager l’enthousiasme de monsieur Naka.
-Ils vous ont donc rapatrié avec eux ?
-Non. Ils ont tout d’abord proposé de me racheter mon dessin. Mais mon père s’y est opposé. Il a reniflé un gros coup sous cette effervescence inhabituelle. Il a toujours eu du nez.
-Donc que s’est-il passé ?
-Pas vexés pour un sou, ils sont repartis en prenant mes coordonnées, et moins d’une semaine plus tard je recevais un billet aller-retour pour le Japon.
-Quelle histoire fascinante.
-N’est-ce pas ? C’est plus tard que j’ai appris qu’un concours interne à la firme avait été mis en place pour trouver une mascotte capable de détrôner Mario.
-Et vous n’aviez jamais joué à une console Nintendo ?
-A votre avis ? J’avais douze ans quand la NES est sortie. Je l’ai reçue en guise de cadeau de Noël la première année de sa sortie. J’étais un fan inconditionnel de ce support…
-Incroyable ! Alors comment avez vous pu…
-Le fric mon bon monsieur. L’argent achète beaucoup de chose, et même sans formation ma famille en avait suffisamment pour que je saisisse son importance capitale dans la vie. Les gens de chez Sega se sont montrés EXTRÊMEMENT généreux.
-Mais tout ce qui les intéressait au départ, c'était uniquement votre dessin ?
-Exact. Mais j’avais conscience de la chance inouïe qui s’offrait à moi. Le PDG de SEGA était complètement accro à ma petite bestiole. Alors j’ai négocié un contrat en béton armé. Je leur ai proposé d’être designer principal de la série et de jouer moi même le rôle de ma création à l’écran.
-Et ils ont accepté ?
-Avaient-ils le choix ? Les meilleurs conseillers juridiques de la boutique de mon père m’ont aidé sur ce coup là, et puis la position outrageusement dominante de Mario les empêchait tellement de dormir qu’ils ont fini par céder.
-Le succès fut immédiat pour vous.
-Fort heureusement, oui. Je vous avoue que tout le monde avait parié gros dans l’histoire, moi y compris, et que les nuits furent plus blanches que calmes durant les mois de préparation.
-L’avance technologique de Sega y fut certainement pour quelque chose.
-Chercheriez-vous à minimiser ma performance ?
-Ah mais pas du tout je…
-Je vous taquine ! Je suis pleinement conscient du fait que la claque technique infligée au monde par la Megadrive a énormément contribué à l’engouement du public. Mais personne n’espérait de tels chiffres.
-Racontez nous la suite.
-Elle est simple. Super Star mondiale du jour au lendemain. Je schématise un peu, mais en quelques mois l’affaire était entendue. Les retards de la Super Nintendo, l’image vieillissante de la NES et la sympathie immédiate de mon personnage m’ont propulsé en tête des ventes. De plus un phénomène inattendu est venu faire pencher la balance en notre faveur.
-C’est à dire ?
-Sonic the Hedgehog est venu cristalliser tous les reproches généralement alloués à une industrie dominante. Nintendo agaçait beaucoup de monde avec sa suprématie honteusement écrasante. L’opinion publique n’aime pas les monopoles. Alors comme il est devenu chic de fustiger Schumacher en F1, il était de bon ton d’aduler Sonic pour se démarquer de la masse. Je suis devenu une sorte de contre-pouvoir, de symbole de résistance à l’hégémonie d’un groupe, un antéchrist sympathique en croisade contre le grand méchant Mario. La Megadrive possédant déjà un parc d’admirateurs fourni, il n’en fallait pas plus pour que le feu d’artifice commence.
-Comment avez vous vécu cette période ?
-C’était magique. Toute ma famille est venue vivre avec moi au japon. J’en avais très largement les moyens. Le fait de travailler en costume me garantissait également de pouvoir vivre tranquille hors des plateaux. Et avec la montagne d’argent qui rentrait tous les mois, ç’a été la grande vie pendant une bien longue période.
-Du style ?
-Du style de ce que mon père m’avait fait entrapercevoir au travers de ses clients les plus célèbres. Sauf que désormais j’étais beaucoup plus riche que la plupart d’entre eux. Soirées féeriques cinq fois par semaine, alcool, filles faciles…
-Drogue ?
-…oui bien sûr. Comment voulez vous résister ? Vous avez le pouvoir et l’argent. Ou plutôt l’argent donc le pouvoir. Ce qui entraîne dans votre sillage des gens plus ou moins fréquentables prêts à tout pour vous satisfaire et ainsi grappiller quelque chose au passage.
-Et c’est à ce moment là que les choses ont dérapé ?
-Certainement pas ! J’étais en pleine gloire ! J’avais les chaperons de SEGA sur le dos vingt-quatre heures sur vingt-quatre pour que justement ça ne dérape pas trop. Les dirigeants de chez SEGA n’allaient pas laisser gâcher la plus belle chance de leur vie !
-Vous ?
-Moi. Sinon qui d’autre ? Qui aurait pu les tirer de ce bourbier dans lequel ils s’empêtraient depuis près de cinq ans ? Alex Kidd ?
-Effectivement vu sous cet angle…
-Voilà. Ils sont arrivés à la même conclusion que vous. Donc les choses restaient sous contrôle. Et puis comme j’avais besoin d’être clair pour travailler, je m’autorégulais assez efficacement.
-Et d’où est venu le nom de Sonic The Hedgehog ?
-En fait les japonais sont parfaitement conscients que pour séduire le marché, l’anglais reste la meilleure arme, sauf chez eux, mais c’est une dynamique plus complexe dans ce cas là. Mais pour le reste du monde, aucun souci. Le design était parfait, la technique était parfaite. Il manquait un nom facile à retenir, agréable à prononcer, un genre de compagnon permanent que chaque gosse rêverait d’avoir à ses côtés. Et compte tenu de la vitesse du jeu, le sobriquet de Sonic a été retenu. Ensuite « Sonic le hérisson » ça ne sonnait pas particulièrement bien. Pas assez vendeur quoi. Par contre Hedgehog ça claque tout de suite beaucoup plus aux oreilles.
-Et pour le bleu ?
-Bah, mon dessin original avait été fait au bon bic bleu de base, et j’avais colorié un peu quelques parties. Ca a beaucoup plu, et les gars du marketing ont jugé qu’effectivement ce serait une excellente chose de le démarquer ainsi, pour le rendre plus magique, plus ludique.
-Effectivement c’était bien pensé.
-Assez oui. Enfin tout est allé pour le mieux jusqu’à la belle mort de la Megadrive…
-Racontez nous.
-Et bien Nintendo a remporté finalement la bataille. Cet espèce de plombier plein de merde a foutu en l’air mes rêves de gloire.
-Vous en avez eu votre part tout de même !
-Oui, mais j’étais toujours « le concurrent », « le challenger », « l’outsider », jamais la star.
-Vous en avez souffert ?
-J’en souffre toujours. La Super Nintendo a remporté une bataille, donc les gars de Sega se sont mis à plancher sur l’avenir. La suite vous la connaissez. Insuffisance de communication de masse, ciblage hasardeux avec des consoles qui cherchent leur public, qualité très inégale du parc logiciel au demeurant très faible, et surtout le rouleau compresseur de Sony en pleine gueule. Ca, on ne s’en relève pas.
-Nintendo a pourtant…
-Quoi Nintendo ?!!? Vous trouvez qu’ils ont de quoi être fiers ?? Vous trouvez leur image enviable ??
-Calmez vous voyons. Ils sont toujours sur le devant de la scène quoi qu’il en soit.
-Ah oui bien sûr ! Et comment ? Sauvés par quoi ? Par qui ? Par un bout de plastique qui rentre autant dans une poche qu’un chibre d’éléphant dans la rondelle d’une gazelle, et par une horde de bestioles ridicules aux noms désespérant de niaiserie sucrée et suintant la vulgarité mercantile qui se prostitue pour récupérer le pouvoir d’achat des moins de dix ans ! Quel tableau ! Ah oui ça c’est con que mon nom n’y soit pas associé ! Voyons voir… « Héripique » ça a une consonnance assez merdeuse pour vous ?
-Ahem, vous vous égarez.
-Grmbl. Le pire c’est que vous avez raison. Ils sont toujours là. Et l’enfoiré en salopette rouge « édition spéciale botte pleines de merde » exerce toujours dans la lumière.
-Et vous ?
-Et bien suite aux résultats mitigés, tous les espoirs ont été reportés sur la Dreamcast. Cette console devait définitivement pulvériser la concurrence. Technologiquement nous étions tellement au-dessus du lot…
-Mais ça n’a pas suffit.
-Non, ça n’a pas suffit… ce que Nintendo avait compris bien avant nous c’est que seul le cœur des joueurs compte pour réussir. Si vous gagnez dans leur cœur, vous gagnez dans les porte-monnaies. Sega pensait que la supériorité technique suffirait à faire passer la pilule, mais non. Communication encore une fois désastreuse, prix exorbitant au lancement alors que la Playstation était maîtresse du marché avec des productions pouvant tout à fait soutenir la comparaison, manque cruel de jeux, piratage enfantin avec l’avènement des graveurs privés, ça fait beaucoup trop de points faibles pour espérer gagner le titre.
-Pourtant les joueurs actuels s’accordent sur le fait que c’est une console exceptionnelle.
-Oui, ceux là même qui ne l’ont pas acheté en son temps, ou qui gravaient les jeux…
-Et là c’est là que tout a dérapé ?
-Oui. Enfin petit à petit. Depuis la fin de la Megadrive la roue avait pris pas mal de jeu quand même. Les échecs répétés n’ont pas amélioré les choses. Mais j’étais trop habitué à mon train de vie pour en changer. Et pour éviter de regarder le triste futur qui se profilait inéluctablement devant mon palier, j’ai plongé un peu plus dans la drogue.
-On prétend également que vous avez violé Tail ?
-Calomnies. Mais c’est tellement facile de tirer sur l’ambulance. Les rumeurs ont fusé de toutes part, et on m’a prêté des mœurs scandaleuses. Je vais vous dire moi : drogue, sexe, alcool, sexe à plusieurs, trafic d’influence, sexe sadomaso, abus de confiance, bondage et fétichisme, tout ça, oui. Mais jamais de zoophilie, de nécrophilie ou quelque rapport contre nature que ce soit ! Le dévergondage a des limites tout de même !
-Sans les avoir franchies vous les avez bien atteintes, non ?
-Retrouvez-vous sous les lumières de la célébrité et redescendez en enfer ensuite, on verra ce que vous deviendrez.
-Mais tout n’est pas terminé. On vous voit encore dans des jeux GBA, non ?
-Honnêtement, vous voyez des épines dans mon dos ? Je suis bleu ?
-Ben non mais…
-Les costumes sont faciles à reproduire vous savez. Le contrat que j’ai signé ne stipulait pas que j’étais propriétaire des droits sur les plateformes qui n’appartenaient pas à Sega. Ils m’ont lourdé comme une merde.
-Vous avez été un grand acteur, il vous reste ça.
-Ah ? Tiens, c’est marrant mais moins de vingt secondes après avoir entendu un prétendu spécialiste du jeu vidéo me confondre avec le smicar actuel qui joue le rôle de ma propre création, j’ai un peu du mal à vous croire…
-…
-Exactement. N’ajoutez plus rien. Je ne suis plus rien. C’était une guerre. A tous les sens du terme. Malheur au vaincu, et ce n’est pas moi qui ai gagné. Laissez moi maintenant.
Je repars vers mon destin. Je suis encore sous le charme de ce personnage à part, simple petit gars bien de chez nous dont la seule ambition était d’y arriver. Est-ce le système qui est mauvais où bien les gens qui le composent ? Les revendications qui ont pour vocation de critiquer l’ordre établi sont-elles compatibles avec la célébrité puisque intrinsèquement elles tendent à remplacer cet ordre et contiennent donc leur propre paradoxe en elles ? Si Sonic avait été porté au sommet de la pyramide par ceux qui contestaient l’hégémonie d’une seule entité, que se serait-il produit ? Autant de questions qui, bien que sans réponse, méritent d’être soulevées à l’heure de la toute puissance de Sony. Et qui, pourtant, restent dérisoires devant le gâchis de talent qui m’a été présenté lors de cette entrevue. Sans jamais avoir été un fan de Sonic je dois pourtant admettre qu’il me manque. La bataille de cette époque avait vraiment de la gueule. Ouais, vraiment. Je décide d’aller me saouler un bon coup pour m’apprendre à parler comme un vieux dénigrant la guerre du golfe en repensant à Verdun.
Triste époque. Ooups merde, il me faudra deux cuites….