"Jacques Chirac. Maintenant"
Castelian
Triffix - 1991
Tours pendables et tirs perdus par Petemul

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Castelian n'a rien à voir avec Castlevania, que ça soit dit d'emblée pour éviter toute équivoque. Par contre Castelian a tout à voir avec Nebulus, que les gourmets des machines glorieuses de nos années 80 connaissent certainement. Nebulus est un jeu en effet assez répandu dans les tiroirs et les boîtes à chaussures Palladium de toute personne ayant possédé à la fois un Amiga (ou Atari, C64, Amstrad...) et un peu d'amour-propre vidéoludique. Pas la grosse célébrité mais on le reconnaît sur les photos. Pas culte au point d'en faire un hit, mais avec suffisamment de bouteille pour forcer la porte d'un éditeur avisé et entraîner moults portages sur les machines d'alors, NES et Game Boy compris. Ce qui tombe plutôt bien en la circonstance.



Ceux d'entre-vous qui connaissent Nebulus peuvent donc retourner sur leur site favori à commenter les derniers soubresauts de l'actualité internationale, puisque pour ceux-ci je spoile comme un goret : Castelian sur Game Boy est un portage honnête et fidèle de Nebulus, à deux-trois éléments près, qui relèvent du détail. Voilà. Je n'aime pas vous faire perdre votre temps, nous sommes entre gentlemen.



Mais je vois que VOUS, vous restez sur cette page, et je me vois donc contraint, rien que pour VOUS, d'en dire plus. *soupir las*. J'espère que je n'aurai pas affaire à des ingrats, parce que croyez-moi, il m'a fallu payer de ma personne.



Donc, Castelian. Il s'agit à première vue d'un de ces jeux de plate-forme-réflexion-calibre 35 comme on en vit tant : un concept, une réalisation au minimum plancher, une exploitation du concept sur 8 niveaux, salut et merci pour le poisson. Nous voici aux commandes d'un personnage grotesque qui va devoir aller d'un point A à un point B, avec sur son passage quelques ennemis et beaucoup d'embûches que vous devrez contourner - c'est le mot - en vous triturant les méninges, et notamment votre sens de l'orientation et de représentation dans l'espace. Ah.



Toute la particularité de Castelian vient en effet de ce que les niveaux ne sont pas sur une ligne droite vue de profil comme un Mario des grands jours, mais se situent à l'éxtérieur de tours que vous devrez gravir dans un effet que vous connaissez si vous avez déjà joué à Super Ghouls & Ghosts. En gros votre personnage est fixe au milieu de l'écran, mais derrière, la tour tourne à mesure que vous vous déplacez, dans un effet de rotation pas piqué des vers pour l'époque. Une fois arrivé en haut, vous faites tout péter, la tour s'effondre, niveau suivant, hop.



Le sommet en question s'atteint évidemment dans la douleur, en passant par des escaliers, des petits ascenceurs, des portes qui vous font traverser diamétralement la structure, des dalles piégées qui disparaissent, des ennemis plus ou moins invulnérables à votre tir cathareux - et qui vous font chuter d'un étage s'ils heurtent votre hitbox géante - et des trous, plein de trous. Et ça tourne. Ca tourne beaucoup. Plein. Tout le temps.



Et


vous


allez


vous


FLINGUER.



Entendons-nous bien. Si je ne me prends pas pour le roi des g4m3rZ, j'estime avec modestie avoir acquis une certaine expériences et quelques bases me permettant de me débrouiller pas trop lamentablement dans la plupart des jeux normaux, y compris avec les standarts d'antan. Pourtant j'ose affirmer que ce jeu est une PURE CHIERIE DE SALOPE. Voilà.



Ce jeu va dévorer votre âme. Merde. MERDE ! C'est un vrai concentré de sadiquerie et de GNIIIIIIII. Votre personnage - appelons-le par son nom, Julius - avance, soit. Il se retourne, et déjà là on se crispe, avec quelques frames d'animation. Ouch. Il saute... d'un bond tout juste suffisant pour passer les trous. Et quand je dis "tout juste", la marge est en effet très faible. Et surtout IL NE SAUTE PAS TOUT LE TEMPS RHAAAA !!! Enfin pour être précis, il saute sous certaines conditions, qui rappellent un peu Prince of Persia. A l'arrêt, pas trop de problème, mais en mouvement... eh bien ça dépend un peu de la position de vos pieds et du timing. Ca demande donc un oeil vraiment, vraiment précis pour sentir le coup... et des nerfs en béton.



Comble de cerise, paroxysme du gâteau, le personnage a une légère mais suffisamment chiante tendance à glisser en arrière s'il touche un rebord de plate-forme sur un saut trop court. En d'autres termes, en cas de contact avec un coin de plate-forme, par défaut, vous vous vautrez. Charmant.



Vous allez donc vous farcir 8 tours complètement horribles, blindées de pièges, de saut au poil de cul, de casse-têtes dans tous les sens (au passage, essayez de tracer une map d'un niveau en spirale ascendante, qu'on rigole) et de portes piégées qui rappellent les jeux Trials & Errors des grandes heures de l'Amiga, période Rick Dangerous. Et ça va piquer sévère. Les vies filent vite et il y a fort à parier que votre frustration et même votre colère grandiront comme ma mite et mon pianiste. Je ne parle même pas des fois où vous devrez vous faire toucher pour atteindre un étage inférieur. Ha ha, les cons.



Mais vous pensez que ça suffit ? Détrompez-vous, je l'ai dit plus haut, nous sommes entre gentlemen. Un niveau construit avec sadisme et précision, on en a vu d'autres. Nous savons, vous et moi, apprendre, nous perfectionner, explorer prudemment, dompter patiemment la bête. 'Slowly, slowly, catch the monkey', nous apprend la sagesse coloniale des pères blancs, trop souvent décriés par l'intelligentsia cosmopolite de l'avenue Foch. Non, ça serait trop facile, et à vaincre sans péril, on triomphe. Et ça serait trop facile. Et donc... donc ça serait trop facile.


Au moins, c'est clair.


Donc on a aussi un timer. LULZ.


Ça aussi.


Et attention. Je ne parle pas du timer laxiste à la Castlevania, genre 999 secondes pour faire un niveau de trois minutes. Non Monsieur, non Madame, sortez les Festina du dimanche, ici vous n'aurez pas ou peu de marge d'erreur. Un faux pas et c'est la rage qui vous étreint lorsque, à deux mètres du bol de sangria, le fatal " 000 " s'affiche et réduit vos efforts à néant. Les derniers niveaux ne vous offriront aucun repos, aucun refuge, nada. Ceci dit un soupçon de pitié a effleuré le coeur du concepteur du jeu : les niveaux bonus. Oui, entre chaque tour, vous accéderez à un niveau intermédiaire, cette fois-ci avec un scrolling classique. Si vous le terminez en avance, le temps restant sera ajouté à votre besace pour la tour suivante : les minutes reportables 15 ans avant les forfaits Ola. Chouette ! Sauf que pour cela vous devez TERMINER le niveau bonus. Ha ha. Ha. Ha..... ah.



Ah. Niveau bonus constitué de plate-formes dans tous les sens, souvent au-dessus du vide. Je glisse à cette occasion que j'ai en ma possession une liste de psychanalystes de garde pas trop cher si vous voulez prévenir un état de démence quelconque et ne pas vous retrouver à lancer votre caca en l'air. Comme ça. Pour dire.



Le tour du fond étant terminé (faites un effort, bande d'empotés) passons à la forme. Pour faire concis : c'est fluide, c'est quelconque, c'est fonctionnel, et c'est silencieux. Sans musique. Ce qui n'est pas une mauvaise chose après tout. Voilà, pouf, pouf.



Finalement, et c'est pas dommage : je ne sais pas si je dois vous recommander ou vous faire fuir ce jeu. Oui je sais, j'en ai tiré un portrait au vitriol dépeignant en creux et sans complaisance les travers de notre société, mais quelque chose me fait dire que ce n'est pas tant de la merde que ça. En fait ce jeu est juste dur parce qu'à l'époque, on faisait comme ça. C'est un jeu dur par parti-pris, pas par réalisation foireuse et programmation absconse. Il n'est pas affreux par manque de soin ou par réalisation par-dessus la jambe, mais au contraire par sadisme méticuleux et appliqué, pensé dans les moindres étapes. Donc je ne peux pas lui cracher dessus à proprement parler. Juste vous prévenir que vous allez en chier du plâtre. Voilà. Au nom de la culture, vous essayerez cette version ou une autre, vu qu'elles sont équivalentes, et ensuite, c'est au nom du sport que vous tenterez l'impossible, ou que vous vous direz que merde, vous avez passé l'âge de montrer que vous êtes cap' de descendre de ce putain de toboggan sur un skate-board.



Je devrais conclure ici, mais ce tableau ne serait pas complet sans la goutte d'anecdote qui met le sel au poudre, sans le 'fun fact' de la mort. Figurez-vous que la menace est venue d'Allemagne en ce qui me concerne. Oui, j'ai acheté ce jeu dans un moment de désarroi spiritique lorsque, jeune prépubère lassé des roses de Göttingen, je me décidai, en ce paresseux mois d'août, à dépenser les quelques Deutschmark généreusement donnés par ma sainte Tante. Je vous laisse imaginer la franche poilade qui s'en suivit pour les derniers jours près de l'ex-RDA. Maintenant jouons, en guise de point final d'une cruelle dérision à cette amusante sauterie :



Parmi les trois affirmation suivantes, une seule est fausse, sauras-tu la retrouver ami lecteur ?

- le manuel était en allemand
- j'ai acheté ce jeu avec NFL Football
- ma cousine était en âge de me rencarder sur les travaux pratiques consécutifs à l'observation de la reproduction de deux papillons



Voilà voilà. Le prochain d'entre vous qui me dit qu'il a une vie de merde, je lui arrache ses gonades, en passant par son oesophage.

Le point de vue de César Ramos :
Pas spécialement courant, mais sans valeur