Oldisme, décalage, humour... 'Cule un mouton.
Outrun
Sega - 1987
Run, run get Out Run, I get Out Run, Yeah ! par MrBlueSky

Extras : Musique - Manuel TXT - Manuel PDF
Ah le collège. Premières clopes, premiers rêves humides, premiers boutons, premiers baisers pour certains, premières fois pour d’autres… Une période bien particulière. Alors imaginez que vous soyez la petite sœur de la plus belle nana du lycée. Celle autour de qui s’agglutinent les « grands » en pleine puberté dès que la cloche a sonné (ça signifie, disait Sheila). Malheureusement, toute petite sœur que vous êtes, vous n’avez pas les qualités (attributs) de votre aînée et vous avez beau vouloir l’imiter, ce n’est pas en crapotant en cachette des menthols à la récrée que vous attirez les regards des garçons de votre classe. Ceux-ci n’ont d’ailleurs d’yeux que pour votre rivale, une nana cool, affirmée, sûre de sa force, légèrement garçon manquée, bref, un caractère. Mettez maintenant une borne arcade dans le rôle de votre grande sœur, la NES dans le rôle de votre rivale et acceptez pour un moment d’être la Master System. Vous arriverez sans mal à expliquer Out Run.



A sa sortie dans les salles d’arcade Out Run caresse l’égo des joueurs exactement où il faut pour rapidement devenir un immense succès. Ferrari rouge pour appâter l’amateur de belle mécanique, superbes pistes sonores variées et longues pour ne pas lasser le mélomane, diversité des décors, des écrans de fin et des animations pour contenter le joueur acharné, belle blonde aux cheveux dans le vent pour… euh… Jacques Dessange. Parfaitement. Vous ne me ferrez pas rentrer dans un débat stérile sur l’objectivation de la femme dans le jeux vidéo. D’autres s’en sont déjà chargé, je perdrais, et comme je suis mauvais joueur la critique s’arrêterai là. Avouez que ce serai dommage (ou pas).



Fidèle à sa stratégie d’adaptation de ses hits d’arcade sur consoles de salon SEGA ne va pas changer de recette et éditer Out Run sur Master System moins d’un an après sa sortie dans les salles obscures. Et comme la version sur borne, sans être révolutionnaire, était une belle combinaison de maitrise technique et de petites innovations bien senties, SEGA va offrir à la version cartouche le plus bel écrin possible. Out Run Master System n’est ni plus ni moins que le premier jeu 2 Meg et premier jeu avec pistes FM s’il vous plait.

Comme rien n’est trop beau pour l’œuvre de Yu Suzuki, l’ensemble des décors, des fins et des musiques sera conservé. C’est tout juste si on ne les allège pas un peu et qu’on retire quelques véhicules adverses. Out Run sur Master System gagne sans contestation possible le titre de l’adaptation 8bit la plus fidèle. Mais est-ce pour autant un bon jeu ?



Un auteur un brin talentueux arriverai à garder un semblant de suspens jusqu’à la fin de sa critique. Un autre, cherchant l’originalité à tout prix placerai un tonitruant TUTUTUTUTUTUTU TUUUU DUUUUUU… DAAAAAAAAYYYYYTTTTTOOOOONAAAAA juste pour réveiller ce lecteur blasé qui scroll depuis ses gogues pour ne pas avoir à débarrasser le repas du dimanche midi chez l’oncle Roger et la tante Germaine. Le modeste chroniqueur que je suis se contentera d’une simple mise en perspective.



Out Run sur Master System est un jusqu’au boutiste. La borne a trois musique, la cartouche en a trois. Tant pis si les joueurs US n’ont pas de module FM et que les Européens jouent en 50Hz transformant « Passing Breeze » en un morceau de chiptune sur cardiogramme fatigué. Les effets de relief de la version arcade ajoutent de la difficulté au soft ? On ne renonce à aucune colline sur Master System. Quitte à rendre certains tronçons injouables avec des « montées » particulièrement laides, souvent ponctuées d’un virage imprenable au sommet (mention spéciale au niveau dans le désert). Les tunnels, les passages de check-point, les allées de colonnes sont tous maintenus au prix d’un changement assez déroutant dans la conduite. Oui la Master System donne tout ce qu’elle a et ne regarde pas à la dépense. Yuji Naka, le programmeur en charge de cette conversion est en mode « quoi qu’il en coûte ».



Exactement comme les prochaines lois de finances promettent d’être un joyeux jeu de vases communicants, la pauvre Master System, pour tenir sa promesse d’arcade à la maison, se retrouve à jongler entre « raster effects », « sprites » et autres « scroling vertical ». Sans entrer dans des détails techniques que je ne maîtrise pas, sachez qu’à la différence de la NES, le scrolling vertical de la petite Master System est verrouillé (on parle de Vlock). C’est ce qui explique que les effets de reliefs soient si fluides sur Rad Racer par exemple quand les collines pré-calculée d’Out Run donnent la nausée.



Ajoutez à cela les limites connues des consoles 8bit en terme d’affichage de sprites et vous expliquez aisément pourquoi votre caisse devient une véritable savonnette quand elle passe sous des colonnades et autres check points. L’astuce consistant ici à carrément changer le gameplay en « vérouillant » la caméra sur une longue ligne droite pour renoncer au raster effect et permettre l’affichage de gros éléments de décors en arrière-plan. Pour les plus curieux je vous invite à consulter l’excellent blog technique d’Upsilandre ou à le suivre sur Twitter. Ce gentleman bidouilleur m’a autorisé à réutiliser ses superbes .gif pour vous montrer comment SEGA a tenté de passer outre les limites techniques de sa machine.



Si nos pauvres yeux de presbytes (si si ça va venir petits coquins) de plus en plus habitués aux écrans HD, IPS, 4K et je ne sais quoi ont besoin d’un léger temps d’adaptation, au bout de la piste (ou après la sortie de route, c’est selon) un constat s’impose : Out Run sur Master System est bien de son époque, il est « chébran » (disait Mitterrand). Bien mieux « câblé » que ses concurrents directs sur Amstrad CPC, ZX Spectrum, Atari ST ou Amiga, son attachante obsession du détail, sa relative fluidité, sa rapidité (surtout sur une console modifiée 60Hz) et sa maniabilité en font un incontournable de la Master System.

Le point de vue de César Ramos :
Aussi classique qu’une 4L. En fouillant un peu vous pourrez encore faire une belle affaire.